Plus clivante que son homologue « accompagnement et soins palliatifs », la proposition de loi créant un droit à l'aide à mourir a néanmoins réussi à réunir une confortable majorité.

Le feu vert des députés à un droit à l'aide à mourir
La proposition de loi (PPL) sur la fin de vie portée par Olivier Falorni, rebaptisée « pour un droit à l'aide à mourir », a fini d'être examinée par les députés en première lecture le 24 mai et a été adoptée ce 27 mai, avec 305 voix pour et 199 contre, lors d'une séance qualifiée d'historique par les observateurs. Ce droit « consiste à autoriser et à accompagner une personne qui en a exprimé la demande à recourir à une substance létale, afin qu'elle se l'administre ou, lorsqu'elle n'est pas en mesure physiquement d'y procéder, se la fasse administrer par un médecin ou par un infirmier ». Décryptage du texte.
Critères d'éligibilité- Pour accéder à l'aide à mourir, la personne, majeure et française (ou résident étranger régulier et stable en France) devra :
- Être atteinte d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, qui engage le pronostic vital, en phase avancée, caractérisée par l'entrée dans un processus irréversible marqué par l'aggravation de l'état de santé de la personne malade qui affecte sa qualité de vie, ou en phase terminale ;
- Présenter une souffrance physique ou psychologique constante liée à cette affection, qui est soit réfractaire aux traitements, soit insupportable selon la personne lorsque celle-ci a choisi de ne pas recevoir ou d'arrêter de recevoir un traitement. Une souffrance psychologique seule ne peut en aucun cas permettre de bénéficier de l'aide à mourir
- Être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée.
La procédure- L'ensemble de la procédure de l'aide à mourir est définie : demande, examen, informations et décision motivée du médecin dans un délai de 15 jours, après accord délai de réflexion du malade d'au moins deux jours, possibilité de renoncement. Le malade pourra déposer sa demande par écrit ou « par tout autre mode d'expression adapté à ses capacités ». S'il ne peut pas se déplacer, le médecin devra se rendre chez lui où dans le lieu où il est pris en charge pour recueillir sa demande. Il devra l'informer qu'il peut bénéficier de soins palliatifs et d'accompagnement et s'assurer qu'il peut y accéder. Il devra de plus proposer de l'orienter, ainsi que ses proches, vers un psychologue ou un psychiatre. La procédure collégiale à l'issue de laquelle le médecin prononce sa décision réunira un collège pluriprofessionnel, auquel il participe et composé au moins d'un spécialiste de la pathologie et d'un soignant intervenant dans le traitement. La personne de confiance désignée par le malade pourra être associée à la procédure collégiale.
La décision du médecin se prononçant sur la demande d'aide à mourir ou de mettre fin à la procédure pourra être contestée devant le juge administratif par le malade uniquement (sauf cas des majeurs protégés).
Droits des malades- La PPL détaille les droits des malades : date de la mort, droit de mourir entouré par les personnes de son choix et hors de son domicile. Dans les cas où la personne s'auto-administre le produit létal, le texte prévoit que la présence du médecin ou de l'infirmier à ses côtés n'est plus obligatoire une fois la substance létale administrée. Il devra toutefois être suffisamment près et en vision directe d'elle pour pouvoir intervenir en cas de difficulté.
Clause de conscience- Sur le modèle de la clause de conscience spécifique à l'IVG, les députés ont instauré une clause de conscience pour les médecins et infirmiers susceptibles d'être sollicités par une personne demandant à bénéficier de « l'aide à mourir ». Ces professionnels ne seront « pas tenus de participer aux procédures » liées à ce nouveau droit s'ils ne le souhaitent pas, mais devront en informer « sans délai » le patient demandeur. Le médecin ou l'infirmier faisant valoir sa clause de conscience devra ensuite « communiquer le nom de professionnels de santé disposés à participer à cette mise en oeuvre ».
Délit d'entrave à l'aide à mourir- L'entrave est définie comme « le fait d'empêcher ou de tenter d'empêcher de pratiquer ou de s'informer sur l'aide à mourir". Elle sera constituée dans deux cas : soit en perturbant des lieux de pratique de l'aide à mourir et le travail des personnels ; soit en exerçant des pressions, menaces ou intimidations sur des personnes cherchant à s'informer sur l'aide à mourir, les soignants, les patients ou leur entourage. Les peines encourues pour ce nouveau délit d'entrave ont été doublées par les députés : jusqu'à deux ans de prison et 30 000 euros d'amende.
Texte (provisoire) résultant des délibérations de l'Assemblée nationale à l'issue de la séance du 24 mai 2025