Dans le n° 66-mars 2016  - Droits des résidents  5494

Fin de vie en EHPAD : le monde du silence

Plus de dix ans après la loi Leonetti de 2005, une nouvelle loi « créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie » a été promulguée avant sa parution au Journal Officiel du 3 février. Si l'arsenal réglementaire se renforce, les EHPAD ne se sont pas vraiment appropriés les outils dédiés à l'expression de la volonté des résidents pour leur fin de vie : les directives anticipées et la personne de confiance.

« Alors que la fin de la vie est la raison d'être des EHPAD, la fin de vie en EHPAD est une question qui, en apparence, ne se pose pas, un non-dit pour les résidents et leurs proches ». En 2013, l'Observatoire national de la fin de vie faisait état dans un rapport d'une « forte dénégation » de la fin de la vie et du « mourir » en EHPAD. Deux ans après, la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) - dans son avis sur le consentement des personnes vulnérables - était aussi sévère, considérant que les droits des personnes âgées à décider pour elles-mêmes sont loin d'être toujours respectés. « L'univers de l'EHPAD est celui du silence qui ne se rompt que si le scandale éclate », assénait la Commission. Dans la continuité de la loi de 2002 sur le droit des malades, de la loi Leonetti de 2005 sur la fin de vie, la nouvelle loi Claeys-Leonetti a créé de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie (droit à la sédation profonde pour les patients en toute fin de vie dont la souffrance est insupportable ; directives anticipées opposables ; personne de confiance). De nouveaux droits qui nécessitent que la culture palliative imprègne réellement les pratiques professionnelles en EHPAD. « Le recueil des directives anticipées et la désignation d'une personne de confiance n'ont pas encore de caractère systématique au sein des EHPAD. Il s'agit d'un exercice / acte complexe auprès de personnes en situation de vulnérabilité lors de la rupture biographique que constitue l'entrée en EHPAD. Celle-ci se faisant de plus en plus tardivement, les soignants sont souvent confrontés à des pathologies qui ne permettent plus des échanges de qualité. Ils perçoivent leurs résidents tels qu'ils arrivent et n'ont que peu d'informations sur ce qu'a été leur vie, qui ils sont », souligne l'Association pour l'Accompagnement et le développement des Soins Palliatifs (ASP Fondatrice) dans une recherche-action.

La nouvelle loi Claeys-Leonetti introduit un caractère contraignant pour les directives anticipées, c'est-à-dire l'obligation pour un médecin de respecter le choix rédigé au préalable par un patient, « sauf en cas d'urgence vitale pendant le temps nécessaire à une évaluation complète de la situation». « On va passer d'un devoir des médecins à un droit des malades » selon la formule du député Jean Leonetti. A condition toutefois de concrétiser ce droit à l'expression des souhaits sur la fin de vie. «La culture des directives anticipées introduite par la loi Leonetti de 2005 n'existe quasiment pas dans notre pays. Moins de 2 % des personnes les rédigent ! », déplore Didier Sicard, président d'honneur du Comité consultatif national d'éthique.

Les directives anticipées, un outil de dialogue

Et en EHPAD, la situation n'est guère meilleure. D'après les premiers résultats de l'enquête nationale 2015 réalisée par l'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (Anesm), publiée le 18 février, 28% des résidents bénéficient d'un recueil des directives anticipées (en moyenne par établissement). En progrès... En 2012, seulement 5% de résidents avaient rédigé leurs directives anticipées selon l'Observatoire national de la fin de vie (2013). Cette même étude mettait alors en évidence que 10 % des médecins coordonnateurs n'abordaient « jamais » les directives anticipées avec les résidents et 27 % «seulement rarement ». Des progrès certes mais on est encore loin du compte, plus de dix ans après la loi Leonetti. «Faire de ces directives anticipées un instrument de dialogue entre les personnes et les soignants n'est pas utopique. Il revient aux médecins de se saisir de cette opportunité », insiste Didier Sicard. Aux médecins traitants, aux médecins coordonnateurs et aux directeurs d'EHPAD. Dans ses recommandations de bonnes pratiques « Qualité de vie en Ehpad (volet 4) : l'accompagnement personnalisé de la santé des résidents », l'ANESM rappelle que les directives anticipées sont envisagées comme un des outils pour « aborder avec le résident, au cours de son séjour dans l'EHPAD, et selon un mode de communication adapté si besoin, le sujet de son décès ». La Commission nationale consultative des droits de l'homme abonde dans le même sens : « Promouvoir les directives anticipées pour toute personne vieillissante apparaît donc comme une nécessité sanitaire importante, compte tenu du constat très largement partagé des mauvaises conditions, notamment relationnelles, dans lesquelles se déroulent les derniers instants de la vie, le plus souvent hors de chez soi et dans un établissement de soins médicaux ».

En l'absence de directives anticipées, la volonté du résident qui ne peut plus s'exprimer peut être relayée par une personne de confiance, expressément désignée par écrit et dont le témoignage prévaut sur tout autre témoignage. La loi Claeys-Leonetti permet désormais qu'un résident faisant l'objet d'une mesure de tutelle puisse désigner une personne de confiance, avec l'autorisation du juge ou du conseil de famille. Le tuteur ne peut ni l'assister ni le représenter à cette occasion. En 2013, selon le rapport de l'ONFV, seuls 36 % des résidents avaient désigné une personne de confiance. « Même s'ils ne peuvent être l'unique réponse à chaque situation, le recueil des directives anticipées et la désignation de la personne de confiance gagneraient à être mis en oeuvre au sein de ces établissements afin de favoriser la réflexion des professionnels autour de la démarche palliative, le dialogue avec les personnes âgées et la prise en compte de leurs choix de fin de vie », considère l'ASP Fondatrice. Un changement de culture professionnelle désormais urgent.

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