Trois questions à Isabelle Lévy, formatrice, conférencière et auteur de "Guide des rites, cultures et croyances à l'usage des soignants" (Editions Estem).
"Les équipes en EHPAD sont attentives à respecter les rites funéraires"
Quelle connaissance les soignants en EHPAD ont-ils aujourd'hui des différents rites funéraires ?
A l'instar de la société française, les résidents en EHPAD ont une diversité culturelle et religieuse. Dans beaucoup d'établissements, la question des croyances et pratiques religieuses est posée lors de l'admission du résident. A vrai dire, il n'y a pas de moment idéal pour aborder le sujet des rites funéraires souhaités. L'essentiel est de respecter la liberté de conscience, la liberté de croire ou non, la liberté de pratiquer ou pas du résident.
Mais ce n'est pas parce qu'un résident se prénomme Christian, Moïse ou Mohamed, que l'on peut préjuger sans l'interroger de sa pratique religieuse. Par ailleurs, le directeur ou l'ensemble du personnel soignant et non-soignant se doit d'afficher une neutralité religieuse absolue. Dans le secteur public ou privé, la religion des professionnels de l'EHPAD reste au vestiaire. Le soignant n'a donc pas à "plaquer" ses propres connaissances ou croyances sur le résident et décider par lui-même de la religion de ce dernier et de son degré de pratique.
De manière générale, les équipes en EHPAD sont attentives à respecter les rites funéraires. La première préoccupation du soignant est de rester à l'écoute de la personne et des familles. Si la personne âgée ne peut pas s'exprimer, on interroge le référent familial ou la personne de confiance.
Il peut y avoir des dissonances entre la volonté propre du résident et celle de la famille. On essaie toujours, avant que la personne décède ou ne puisse plus s'exprimer sur ce sujet-là, d'engager au moins la conversation. Lors du décès, faudra-t-il appeler un prêtre, un imam, un rabbin ? Quelle prière doit-on réaliser ? Les rituels religieux peuvent être modérés selon l'origine culturelle, le mode de pratique du résident. Certaines personnes refusent totalement le contrat obsèques, d'autres l'acceptent très facilement. Dans le judaïsme ou l'islam, une personne ne doit pas organiser ses obsèques, c'est sa famille qui va respecter les rituels.
Quelles informations peuvent apporter les représentants des différents cultes aux équipes soignantes ?
Les EHPAD publics ont l'obligation légale de réunir une équipe de représentants du culte pluriconfessionnelle avec des représentants des cultes correspondant à la diversité religieuse des résidents accueillis. Si les équipes soignantes ignorent les rites et cérémonies mortuaires inhérents à la religion du défunt, elles peuvent ainsi recourir aux aumôniers présents dans l'établissement. Dans un EHPAD privé, le directeur a le droit de rester ouvert à ce qu'un résident fasse appel à un ministre du culte pour discuter avec les soignants des rites souhaités à l'heure de son décès.
Quels sont les gestes importants pour les soignants au moment du décès ?
La toilette mortuaire effectuée par les équipes soignantes est à différencier de la toilette réalisée dans la chambre mortuaire qui permet la pratique sur place des différents rites à caractère religieux. Au moment du décès, les gestes des soignants s'inscrivent dans le cadre d'un protocole de soins : retirer les dispositifs médicaux, refaire les pansements des plaies et sutures, mettre une protection anatomique, habillage... Il faut laisser le corps à plat sur le dos, la tête légèrement surélevée et surtout les bras le long du corps. Ce n'est qu'après la toilette funéraire, le cas échéant, que le corps du défunt sera "installé" selon son rite.