Dans le n° 131-septembre 2021  -  Restauration  12180

« Du 47 dans nos assiettes » : après les collèges, les Ehpad

Le conseil départemental de Lot-et-Garonne a réussi son pari de faire manger bon, frais et local les 12 500 élèves de ses 24 collèges publics et va étendre son programme « Du 47 dans nos assiettes » à une vingtaine d'Ehpad réunis au sein d'un GCSMS particulièrement proactif.

Le nouveau conseil départemental de Lot-et-Garonne a décidé le 23 juillet d'élargir à une vingtaine d'Ehpad son programme de restauration collective « Du 47 dans nos assiettes ». L'une des toutes premières mesures annoncées par la présidente réélue Sophie Borderie pour son mandat 2021-2027 ! 

Dans les 24 collèges publics gérés par le département, le 47 est désormais dans les assiettes de 12 500 collégiens grâce à ce programme de soutien à l'agriculture de proximité, qui a résolument privilégié les circuits courts, avec des produits frais et de saison, en rétribuant les producteurs au juste prix, via un groupement départemental d'achats de denrées. Avec, sur l'autre plateau de la balance, une nécessaire chasse au gaspi pour équilibrer les budgets et tenir les prix.

Le département a été tiré par la manche en 2019 par le groupement de coopération sociale et médico-sociale (GCSMS) de Lot-et-Garonne désireux de s'inscrire dans ce sillage et de bénéficier des résultats obtenus dans les collèges.

Déjà une mercuriale commune

Le groupement a été constitué à la fin de l'année 2010 par sept Ehpad du Haut-Agenais avec pour objectif la recherche d'efficience par la mise en commun d'outils et de services. Il a ensuite étendu son périmètre à l'ensemble du Lot-et-Garonne en 2014 puis au département voisin de Dordogne en 2017. Il regroupe aujourd'hui une trentaine d'établissements : Ehpad (en majorité), services de soins infirmiers à domicile, structures d'accueil pour personnes en situation de handicap, centres hospitaliers de proximité, qui relèvent, pour la plupart, de la fonction publique hospitalière.

Sous l'impulsion de son administrateur, Guillaume Barbosa, qui dirigeait alors les Ehpad de Castelmoron-sur-Lot et Clairac, l'un des premiers projets du groupement a été de créer une mercuriale commune pour l'achat des denrées alimentaires. Un objectif atteint en 2017 avec 17 établissements dans la boucle : « Le but premier était de maintenir une qualité élevée avec des coûts rationalisés. Nous avons réalisé un audit préalable de la fonction achat de chaque cuisine pour construire cette mercuriale sur le principe du meilleur rapport qualité-prix », explique-t-il.

Le GCSMS prévoit alors une analyse mensuelle de l'exécution du marché, globale et par établissement, avec remontée des informations auprès de chaque direction. Il s'agit en effet de mettre fin à la cacophonie constatée auparavant avec des marchés de gré à gré au devenir aléatoire et des cas de non-respect de la réglementation...

« Le groupement a passé à l'époque un premier marché, son propre marché, poursuit l'administrateur, mais il n'avait pas les leviers pour agir sur les filières de production et il courait un risque de manque de rigueur juridique. Alors nous nous sommes tournés vers un partenaire de confiance : le conseil départemental. Son retour d'expérience sur les collèges était plus que convaincant ! »

Ne pas commettre les mêmes erreurs

Il semblait logique de ne pas vouloir réessuyer les mêmes plâtres, et ce bien que l'équation soit différente de celle des collèges : 4 repas par jour dans 19 Ehpad publics autonomes (et un foyer de vie pour adultes handicapés) pour un public d'environ 1 600 résidents, il faudra adapter la recette de la réussite...

Et la réussite « Du 47 dans nos assiettes » ne tient pas du coup de baguette magique ! Philippe Huvé, chef de service restauration collective au conseil départemental évoque un « travail de fond ». Trois agents l'ont épaulé. Il a d'abord fallu doublement rassurer : plusieurs dizaines de producteurs locaux, sur la viabilité économique (les marchés sont désormais passés pour trois ans afin de leur donner de la visibilité) ; les cuisiniers, sur les observations menées dans leur cuisine pendant une semaine, relevés de pesées à l'appui, depuis la livraison des produits jusqu'au retour des assiettes des collégiens en passant par l'épluchage, la cuisson, etc. « Ils ont finalement été convaincus, explique Philippe Huvé, et notre traque au gaspillage a payé : de 30 %, on est passé à 10 %, ce qui représente 600 000 euros d'économies sur un budget total de 2,2 millions que nous avons réinjectés dans la qualité, en réussissant à maintenir le coût de revient produits d'un repas à 1,90 euro. » Tout le monde a adhéré au principe simple : « bien manger signifie moins jeter ! »

Tout sera passé au peigne fin

L'une des clés de la réussite a résidé aussi dans la mise en place d'un groupement d'achat départemental permettant aux structures locales de répondre aux appels d'offre tout en respectant les règles des marchés publics. Et les résultats parlent d'eux-mêmes : l'utilisation de produits frais est passée de 40 % en 2013 à 80 % en 2019, et aujourd'hui 100 % de ces produits frais sont fournis par plus de 300 producteurs locaux et régionaux.

Tous ces atouts ont été mis dans la corbeille du partenariat département/Ehpad officiellement signé en février 2020, mais qui a été stoppé net dans son élan par la crise sanitaire. Un seul audit a été mené dans l'Ehpad de Castelmoron-sur-Lot, indique Guillaume Barbosa qui ne le dirige plus aujourd'hui - en novembre 2020, le D3S a été nommé directeur général de l'établissement public départemental Clairvivre, en Dordogne, un mastodonte du secteur du handicap.

« Or cette observation d'une semaine est un préalable important, dit-il. Le département, qui a commencé à accompagner les Ehpad dans la démarche sous la houlette de Philippe Huvé, vient de se dire prêt à passer au stade d'expérimentation complète, avant la généralisation. » Trois Ehpad pilotes se sont portés volontaires : Castelmoron-sur-Lot, Puymirol, Verteuil/Miramont-de-Guyenne (direction commune), et le foyer de vie Monclar.

L'opération va commencer « en douceur », indique l'administrateur du GCSMS. Là aussi, il va falloir convaincre les cuisiniers.... et les familles (!) qu'une bonne marmite ou une bonne assiette ne doit pas forcément déborder... Car, on le sait, dans les Ehpad, la principale source de gaspillage se trouve dans les trop grandes quantités de nourriture servies.

Qualité, quantités, cuissons, comportements en salle ou en chambre, tout sera passé au peigne fin pour s'ajuster aux besoins des personnes âgées, un public bien différent des collégiens. Les déchets seront également analysés, afin d'étudier en détail ce que mangent, ou pas, ou moins, les résidents.

Autre enjeu de l'Ehpad, il faudra faire travailler à l'unisson les personnels de cuisine et d'hôtellerie.

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