Dans le n° 133-novembre 2021  - Maryse Duval, présidente de la commission nationale personnes âgées de la Fehap  12348

« Le congrès de la Fehap nous invite à nous inscrire résolument dans l'après crise »

« L'énergie solidaire pour demain » est le thème du congrès de la Fehap qui se déroulera les 24 et 25 novembre à Nancy. Membre du bureau fédéral et présidente de la commission nationale personnes âgées, Maryse Duval nous éclaire sur ces retrouvailles postcrise.

Le congrès de votre fédération va-t-il signer un retour à la normale ?

Nous l'espérons tous. Il se déroulera dans le Grand-Est, la première région à avoir été touchée de plein fouet par l'épidémie et notre délégation régionale a été sur le pont dès février 2020 : nous avons en urgence aidé localement nos 218 organismes gestionnaires adhérents et leurs 681 ESMS, dont 286 pour personnes âgées - je le précise, nous sommes la deuxième plus importante délégation régionale de la Fehap.

Au national, notre fédération et sa commission nationale personnes âgées ont immédiatement mis toute leur énergie dans la gestion de crise : nous avons travaillé comme des fous à accompagner nos adhérents, à éplucher l'avalanche de recommandations ministérielles, de consignes des agences régionales de santé, de nouvelles normes... Nous avons aussi fait connaître quasi en temps réel les remontées très concrètes du terrain dans la concertation sur les textes de loi et réglementaires Covid-19. Le dernier exemple en date est le pass sanitaire cet été : la Fehap a largement contribué à alimenter et animer la foire aux questions du ministère.

Allez-vous renouer avec le travail prospectif ?

Il a été mis en stand-by, mais depuis avril, avec mes collègues, nous osons respirer et depuis septembre nous nous sommes remis en mode projet. Nous n'avons pratiquement plus de cas de Covid. Avec prudence, nous nous autorisons de nouveau à penser développement, innovation pour performer nos organisations. Alors le congrès de Nancy aura sans doute une vertu d'exutoire car les directeurs d'Ehpad ont vraiment été ébranlés mais nous allons surtout thésauriser ce que nous avons appris de cette épreuve, au-delà de tous les modèles existants - rien n'anticipait une pandémie, je pense au plan Bleu par exemple. Mais comme à l'échelle du pays, nous avons besoin de passer à autre chose et avec son thème « l'énergie solidaire pour demain », le congrès de la Fehap nous invite à nous inscrire résolument dans l'après-crise.

Les enjeux ont-ils changé ?

Plus que jamais il faut penser les innovations organisationnelles à partir des besoins et souhaits des personnes âgées et de leurs proches aidants. C'est le thème de l'une de nos deux tables rondes dédiées du 24 novembre. L'offre territoriale existante doit évoluer en potentialisant les dynamiques actuelles et en mettant en oeuvre des transformations pour favoriser un accompagnement coordonné et sans rupture, tout au long du parcours de la personne âgée.

Une coopération des acteurs (établissements, services intervenant à domicile, autorités de tutelle, élus locaux...) et l'usage étendu des outils mis à leur disposition (CPOM territorial, SI partagé en santé...) doivent contribuer aux indispensables dialogue et décloisonnement des champs sanitaire, social et médico-social. La Fehap est évidemment au coeur de cette transversalité et sa direction autonomie a d'ailleurs formalisé des propositions (voir encadré).

Et l'autre table ronde ?

Elle portera sur l'habitat inclusif comme modèle d'avenir. Denis Piveteau et Jacques Wolfrom ont remis le 26 juin 2020 leur rapport « Demain, je pourrai choisir d'habiter avec vous ! » sur un nouveau modèle d'habitat accompagné, partagé, et inséré dans la vie locale - l'habitat API - pour les personnes handicapées ou âgées ayant besoin d'être soutenues dans leur projet d'autonomie. Dans la valse des rapports, Dieu sait si celui-là est important ! Il porte une vision d'avenir du « vivre chez soi sans être seul » qui suppose et impose que les habitants soient d'abord acteurs. Mais il faut sécuriser de nouveaux modèles économiques, alors que, par exemple, le coût du bâti très élevé dans certains territoires est un frein. Il s'agit d'une solution dans une palette de solutions.

Quelle place gardera l'Ehpad dans cette palette ?

Il restera indispensable pour les personnes très dépendantes, très isolées, malades... Songez qu'aujourd'hui, les résidents y cumulent en moyenne huit pathologies ! La Fehap défend un modèle le plus proche possible du domicile, ouvert sur l'extérieur, projeté hors les murs vers les personnes âgées du territoire. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2022 propose d'ailleurs aux Ehpad volontaires de devenir « centres de ressources territoriaux ». Si la transformation de l'offre et des modalités d'accompagnement des personnes âgées fait consensus, la question demeure : comment va-t-on financer l'Ehpad de demain ? Et de manière plus globale la perte d'autonomie ? Nous plaidons pour un financement basé sur une logique de solidarité nationale venant compenser un reste à charge encore trop important pour les personnes et leurs familles, en établissement ou au domicile.

Mais aujourd'hui, la 5e branche ne fonctionne pas et la grande loi attendue a été reportée à après les présidentielles. La prise en charge de la perte d'autonomie est décidément une patate chaude qu'on ne cesse de se refiler.

Les départements sont-ils à l'écoute ?

On est tout juste en postélection... Peut-être l'Assemblée des départements de France communiquera-t-elle à l'occasion du salon des Maires qui se déroulera juste avant notre congrès. Mais en ce moment, les conseils départementaux, élus ou réélus, préparent leur budget 2022 : précarité, insertion, RSA, dépendance, et maintenant, transition énergétique... Ils ont beaucoup à faire ! Je les sens peu disponibles. Il faut dire aussi qu'ils ne sont pas acteurs de toutes les décisions récentes qui les impliquent.

L'attractivité des métiers reste-t-elle une priorité ?

On ne peut imaginer l'Ehpad de demain sans personnel ! Or, le manque d'attractivité est une évidence, et la crise sanitaire n'a fait que l'aggraver. Ici dans le Grand-Est, nous le voyons bien, aux confins des frontières du Luxembourg et de la Belgique... Mais ce n'est pas qu'une question de salaires : dans le secteur du grand âge, ils ont été significativement revalorisés par le Ségur, et pourtant nous ne notons pas de frémissement dans les recrutements. Un important travail d'image doit être mené auprès des jeunes sur la valeur « prendre soin des personnes âgées ».

Par ailleurs, il manque vraiment une brique entre la sortie de l'Éducation nationale et l'entrée dans nos établissements. Que ce soit en matière de logement, mobilité ou santé, de nombreux jeunes rencontrent des difficultés sociales, je pense en particulier aux apprentis qui, du coup, décrochent. Un accompagnement social devrait être organisé pour les outiller à travailler et apprendre sereinement.

Mais nous n'allons pas baisser les bras. C'est inédit, la Fehap et Nexem ont décidé de lancer un ambitieux plan commun d'actions pour l'attractivité des métiers du secteur privé non lucratif, reposant sur les dispositifs existants et l'élaboration de nouveaux outils incitatifs. Les deux fédérations vont le présenter à leurs réseaux d'ici la fin de l'année.


Mini bio

Depuis 2013, Maryse Duval est directrice générale de Groupe SOS Seniors basé à Metz, 111 établissements et services, dont 70 Ehpad, 5 Ssiad, 14 résidences services et résidences autonomie..., pour plus de 3 600 salariés.

Après 15 ans d'expérience dans la gestion et le management de réseaux d'agences d'aide et de services de soins à domicile - avec la création de Domaliance -, puis la direction opérationnelle de DomusVi de 2008 à 2012, elle a été co-fondatrice de La Compagnie des Aidants (2012-2013). Outre ses fonctions nationales au sein de la Fehap, elle est membre de sa délégation régionale Grand-Est.


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