Dans le n° 44-mai 2014  -  Dépistage systématique  3952

Déficiences sensorielles : comment lutter contre ?

Les perceptions sensorielles s'amoindrissent avec le vieillissement. Nous avons demandé à Laurence Gangnant, médecin-coordonnateur à l'Ehpad Le Tilleul Argenté à Chelles (93) de nous en décrire les conséquences et les traitements possibles.

Les organes des sens se détériorent avec l'âge de façon variable selon les individus. Des programmes d'intervention qui aident à prévenir, limiter ou retarder les incapacités qui en résultent, représentent un moyen de lutte contre les effets du vieillissement.

Cependant, les évolutions récentes de l'espérance de vie sans incapacité (EVSI) en France et en Allemagne, calculée à l'âge de 65 ans à partir du GALI (Global Activity Limitation Indicateur) montrent que si l'espérance de vie continue d'augmenter, l'espérance de vie sans limitation d'activité, semble stagner au cours des dernières années (depuis 2004) en France et en Allemagne comme dans la plupart des pays Européens (ref. Livre blanc de la gériatrie Française, 2011).

Les déficits sensoriels doivent être reconnus le plus vite possible pour faire l'objet d'une prise en charge efficace.

Il n'y a actuellement pas de traitement curatif pour la presbyacousie mais ses conséquences peuvent être largement minimisées par l'appareillage auditif. Plus il débute tôt plus, les résultats sont positifs. Les limitations sont:

- Le prix et le faible taux de prise en charge

- L'acceptation sociale d'un appareillage.

Les déficits de la vue et de la sphère ORL imposent le recours à un spécialiste. L'accès aux soins spécialisés doit être facilité.

Comment repérer les déficiences sensorielles en EHPAD et faire que tous les intervenants soient au courant?

Il est important de bien connaître le résident et d'évaluer ses déficiences sensorielles dès son arrivée en EHPAD. Les visites de pré-admission et d'admission doivent être de qualité avec du temps consacré à l'évaluation sensorielle. Les informations doivent être partagées avec l'équipe (fiche de présentation du résident).

Ensuite le projet d'accompagnement personnalisé rédigé en équipe pluridisciplinaire peut intégrer un item sur les capacités sensorielles du résident. Les consignes (mettre appareils auditifs, vérifier usure des piles, port des lunettes, prothèses dentaires...) doivent être répétées au niveau du plan d'aide.

Enfin, il existe des formations destinées aux soignants pour les sensibiliser aux handicaps sensoriels et physiques des résidents (exemple SIMULAGE) et les aider à adapter leur prise en charge.

Faire un repérage systématique est-il possible en EHPAD?

Le diagnostic et la prise en charge des déficits sensoriels passent par le recours aux spécialistes: ophtalmologues, ORL, dentistes... Il est impossible d'organiser des consultations sur le site de l'EHPAD. Se pose alors le problème d'envoyer les résidents en consultation externe. De multiples transports sont à organiser (frais de transport non pris en charge), et l'accessibilité des cabinets parfois difficile. Le résident doit le plus souvent être accompagné par un proche dans sa démarche, d'autant plus s'il présente des troubles cognitifs qui rendent difficile le consentement aux soins et l'étude des devis en cas d'appareillage...

Ces dernières années, des prestataires ont commencé à proposer certaines actions sur le site même de l'EHPAD:

L'évaluation de l'acuité visuelle, correction de verres, réparation de lunettes (opticiens)

L'entretien des prothèses dentaires (prothésistes dentaires)

L'entretien et réglage des appareils auditifs (audioprothésistes)

Une étude américaine (1) expose les résultats d'un dépistage systématique des troubles de la vue chez 380 résidents en EHPAD. Dans cette étude, plus d'un patient sur 2 a un trouble de la vision qui pourrait être amélioré par le port de verres correcteurs et/ou la chirurgie de la cataracte. Owsley et al. estiment que la baisse d'acuité visuelle est 3 à 15 fois plus fréquente en EHPAD que dans la population générale du même âge. Ce fort pourcentage s'explique par le fait que la baisse de l'acuité visuelle est un facteur de risque indépendant de l'institutionnalisation (RR=1.8) mais aussi parce que le patient polypathologique est sous-traité.

Ces données encouragent donc à un dépistage systématique en EHPAD, d'autant que le bénéfice des actions de correction est certain. Ainsi une autre étude de ces mêmes auteurs (2) évalue l'impact de la chirurgie de la cataracte chez 30 patients de 81 ans ayant un MMS>13. L'étude met en évidence une amélioration de la qualité de vie pour les actes de la vie quotidienne impliquant fortement la vue tel que la lecture ou la télévision, mais également une amélioration des interactions sociales. Par contre il n'est pas mis en évidence de diminution de la dépression.

Aucune étude n'inclut de patients ayant une démence sévère même si l'analyse des troubles de la réfraction ne nécessite pas la participation du patient. Il est concevable d'obtenir des verres correcteurs adaptés même pour des patients non coopérants. Une meilleure appréhension de l'environnement conduirait probablement à une diminution de l'anxiété et du risque de chute.

Quelles conséquences la perte des sens ajoute-elle aux maladies cognitives?

Les conséquences sont multiples et à tous les stades de la maladie cognitive. Dès le début de la maladie les difficultés attentionnelles rencontrées par le patient peuvent être majorées par une perte de la vue et/ou de l'audition associées. La tendance au repli et à restreindre leur communication peut s'en trouver renforcée.

La démarche diagnostique, en début de la maladie cognitive, peut aussi être plus complexe. Il est difficile d'objectiver un défaut de mémorisation quand l'information à mémoriser (la question du conjoint, l'information du jour, le "je te l'ai déjà dit"....) n'a pas été vue ou entendue.

La perte des sens a aussi une influence sur les troubles du comportement. Ainsi l'apathie, c'est-à-dire le désintérêt vis-à-vis des activités antérieures souvent associé à une moindre réaction aux circonstances émotionnelles, pourra être accentuée par l'isolement sensoriel. La mauvaise perception de l'environnement pourra aussi contribuer à une plus grande anxiété, voire une plus grande agitation dans les stades plus sévères. Le risque de chutes est démultiplié si aux troubles cognitifs s'associe un déficit visuel. Enfin les pertes du goût et/ou de l'odorat augmentent le risque de dénutrition associé aux maladies cognitives.

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