Dans le n° 135-janvier 2022  - Partie 2  12468

Covid, care, virage domiciliaire : quand une transition en cache une autre

L'approche par le « care » n'est pas une simple théorie, une rhétorique, une utopie « new age », une façon d'aborder le monde par la face de la bienveillance. La question ne se résume pas à une posture, à une attention intellectuelle mais se traduit concrètement par le travail et l'action.

Le travail du care est réalisé principalement par des femmes, formées et plus souvent mal payées. Mais aussi par des aidants, non rémunérés et bien souvent invisibles. Il s'agit d'un travail collectif de production d'une politique du soutien et de l'attention capable de réduire les précarités et de former une société de l'accompagnement[1]. L'approche n'est pas une idéalisation de la fragilité et de celles et ceux qui aident à y faire face, mais une recherche des conditions et des contraintes pour apporter les réponses adéquates, pour valoriser, symboliquement et financièrement, les professionnels du care. Le care ne se place pas en surplomb, c'est en cela qu'il s'agit d'accompagner et non de faire « pour » les personnes. Cela procède d'un effort collectif qui tente aussi d'éviter « les dérives du paternalisme et du maternage[2] », pour accompagner le cheminement de l'individu vers plus d'autonomie et de capacité d'agir. Cet accompagnement a besoin de se situer dans un espace donné et limité pour permettre aux personnes concernées de pouvoir agir concrètement et mesurer les effets de leur propre mobilisation. C'est en cela aussi que les territoires investis par le logement social offrent des perspectives d'action et d'innovation citoyenne et sociale.

La proximité, outil de réassurance

L'intervention sur un territoire donné et limité offre une forme de sécurité culturelle, de connaissance sereine d'autrui, d'appréhension de l'espace... Ce triptyque favorise la confiance en soi des personnes fragiles et fragilisées mais aussi la capacité des acteurs, individus comme structures, à faire confiance. Or, en France, la défiance envers l'autre comme envers les institutions était un fait social majeur qui a des effets sur nos modes de vie, nos projets et nos imaginaires. Rappelons que depuis 2013, date de la première édition de l'étude barométrique sur les « Fractures françaises », l'item « On n'est jamais assez prudent quand on a affaire aux autres » se situe chaque année entre 77 et 80 %... Seulement 18 % des ouvriers et des employés pense qu'« on peut faire confiance à la plupart des gens », contre 34 % pour les cadres et 29 % pour les retraités3. De ce point de vue aussi l'action par le care propose un contre-feu d'autant plus efficace qu'il se pratique dans une perspective de proximité géographique.

Un habitat pour prendre soin

Reste qu'à l'heure du « virage domiciliaire », il importe de mesurer combien le logement, et plus largement l'habitat, est un vecteur essentiel d'accompagnement en santé. Nous n'en avons pas conscience mais nous passons plus de 80 % de notre vie entourés de murs, dans un bâtiment, au travail ou à domicile. Les conditions de vie dans un logement participent très directement à la santé des personnes : chutes à domicile, mauvaise aération ou isolation sonore, matériaux anciens... Pensons aussi aux aspects d'accessibilité, à l'espace disponible dans le logement... La lumière naturelle enfin a un impact direct sur notre moral, et ce n'est que tardivement que 20 % de surface vitrée minimum en façade ont été imposés pour les constructions neuves.

Le logement participe directement des conditions de santé. Les mouvements en faveur de l'hospitalisation à domicile, hier, et du virage domiciliaire, aujourd'hui, ne peuvent faire l'impasse sur les conditions de vie et de logement, sur l'environnement des personnes, sur la qualité et la densité de services à domicile...

Si la Covid-19 a pu faire changer certaines représentations, si elle a conduit à une prise de conscience de la fragilité humaine, si chacun a pu mesurer qu'en dépit des innovations technologiques, la période que nous traversons encore oblige à (re)penser les liens et les interdépendances, cette épidémie nous donne une sacrée occasion de mettre en avant la société du care, d'inventer ou de relancer la solidarité sociale.


@Guerin_Serge

Professeur à l'INSEEC GE. Vient de publier « Au service de la vie. Les métiers du service à la personne », Fauves éditions, 2021, et avec V. Suissa et le Dr Denormandie, « L'homéopathie en 20 questions », Michalon, 2021. Président de l'A-MCA.

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