Dans le n° 49-octobre 2014  -  Comparaison France-Chine  4203

Un modèle français pour les maisons de retraite chinoises ?

Marie-Anne Fourier, directrice de l'établissement Les Abondances à Boulogne Billancourt (92) a visité deux établissements gériatriques chinois du Hunan en avril 2013 dans le cadre d'un partenariat. Extraits de son courrier (téléchargeable in extenso à partir de Geroscopie.fr).

Ce voyage a été l'occasion de découvrir in vivo l'évolution actuelle de la situation des personnes âgées en Chine, pays qui vit une mutation accélérée à laquelle elle s'est peu, voire pas préparée.

Un rythme accéléré de vieillissement

En 2020, le pays comptera 248 millions de plus de 60 ans, soit 17% de sa population (12% actuellement) et en 2050 près d'un chinois sur 4 aura plus de 60 ans (150 millions auront plus de 80 ans, contre 6 millions en France).

Dans ce grand " chambardement " général lié à un développement économique débridé, la question de la place des vieux n'a pas été anticipée. Moins de 1% des personnes âgées sont en maison de retraite, contre 5 à 7% en Occident.

Fin 2010, la Chine ne comptait que 40 000 maisons de retraite (2,5 millions de lits) pour 1,3 milliard d'habitants. Aucun système de prise en charge centralisé et standard dans tout le pays n'a été mis en place. Chaque province, et au sein de chaque province, chaque ville, tente d'organiser la prise en charge des seniors dont le nombre va croissant.

L'Etat a récemment autorisé l'ouverture de maisons de retraite privées et a pris conscience de cette thématique du Grand Age, qui implique d'une part d'organiser le maintien à domicile pour l'instant très peu développé, d'autre part de construire des maisons de retraite et des accueils de jour.

L'exemple de la province du Hunan

Province méridionale de 67 millions d'habitants (2004), le Hunan est une province riche.

" La maison de retraite dans laquelle j'ai été accueillie était à l'origine un établissement public qui périclitait. Les pouvoirs publics ont préféré la confier à un entrepreneur privé, moyennant le versement d'un loyer à charge pour lui de financer la rénovation. Elle héberge actuellement 80 personnes âgées. A terme sa capacité d'accueil doit atteindre 200 lits.

Sa gestion est très imbriquée avec celle du groupe dirigé par le chef d'entreprise, qui compte au total 300 salariés. Ainsi la plupart des cadres de la maison de retraite ont été recrutés parmi les cadres du groupe. C'est notamment le cas d'une jeune femme de 42 ans qui était au départ institutrice, a été embauchée en 2009 pour gérer des prestations de ménage et gardiennage puis s'est vue nommée responsable administrative de la maison de retraite après une formation de management de quelques mois.

Cette jeune femme gère un effectif de 29 personnes, assistée par 3 cadres (achats, comptabilité, admissions), d'un médecin gérant une " équipe " de deux infirmières, de 18 aides à tout faire (auxiliaires de vie), 2 cuisiniers et 2 ouvriers.

Les personnels recrutés n'ayant aucune formation initiale, une Association a été mise en place pour dispenser des enseignements à la fois pour les managers et les " auxiliaires de vie ".

Conditions de travail du personnel

La jeune femme manager et une bonne partie du personnel habitent dans la Maison de retraite. Les " aides à tout faire " vivent avec les résidents. Ils s'occupent en moyenne de cinq résidents. Ils dorment dans la pièce mitoyenne des chambres des résidents qui nécessitent une surveillance nocturne, et dont ils s'occupent 24h/24. Ils n'ont pour ainsi dire aucune vie privée possible.

Les deux infirmières assurent une présence de 24h à tour de rôle. Le médecin vit également sur place et est d'astreinte 24h/24. Si les résidents de la Maison de retraite ont besoin de soins un peu techniques, il les transfère aussitôt à l'hôpital de la ville avec lequel la Maison de retraite a une convention de partenariat. L'établissement n'est pas du tout médicalisé. A notre grand étonnement, la médecine chinoise n'y est pas plus présente que la médecine occidentale.

Les chambres sont desservies par un couloir vitré, donnant sur jardin et participant à créer une atmosphère communautaire. Bien que rénovées, les chambres sont exigües, assez sombres, le mobilier peu adapté. Pas d'équipement médicalisé, pas d'accessibilité pour les fauteuils roulants, sauf au rez-de-chaussée, pas d'ascenseurs, portes étroites, salles de bain exigües. Pas de lieux de vie collective en dehors du jardin et d'un réfectoire partagé par le personnel et les résidents les plus valides. Pas de chauffage (alors que les nuits sont fraîches).

L'expertise française

La France peut apporter son " savoir-faire ":

- adaptation des maisons de retraite sur le modèle des EHPAD français

- développement de l'hébergement médicalisé pour les personnes les plus poly-pathologiques (USLD)

- offre spécialisée Alzheimer : unités de vie protégées, PASA, plateformes de répit...

- alternatives à l'hébergement : accueils de jour, SSIAD, hébergement temporaire

- et point essentiel, développement de " réseaux gérontologiques " permettant une articulation efficace des différents intervenants publics et privés au service des aînés selon le concept des MAIA françaises.

La France peut fournir à la Chine un modèle " exportable " sur :

- la démarche qualité, notamment en matière d'hygiène

- les normes architecturales, notamment en matière d'accessibilité des locaux

- les équipements ergonomiques : lits à hauteur variable, lève-malades ...

- les ressources humaines : formation des personnels, fiches de poste...

- la médicalisation : adaptation des structures à un alourdissement à venir de la dépendance et des pathologies des résidents (Alzheimer)

- la vie sociale et culturelle : devenu un véritable métier, l'animation en structure gériatrique constitue un point fort du modèle français.

Marie-Anne FOURRIER

Directrice d'un Etablissement Gérontologique Public de Santé

Avec l'aide de Chen Lu et Arnaud Goasguen

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