Dans le n° 80-mai 2017  - Dr Alain Bérard, directeur adjoint de la Fondation Médéric Alzheimer  7346

« Prioriser l'intervention psychosociale pour la qualité de vie des malades d'Alzheimer »

En 2020, un Français de plus de 65 ans sur quatre devrait être touché par la maladie d'Alzheimer. Un enjeu de taille pour les malades, les aidants et les professionnels notamment en EHPAD. Sommes-nous en mesure de faire face à ce "tsunami sanitaire" ? Éléments de réponse avec la Fondation Médéric Alzheimer.

Le système sanitaire et médico-social français est-il prêt pour la "pandémie épidémiologique" à venir avec la maladie d'Alzheimer??

Dr Alain Bérard - La maladie d'Alzheimer a fait l'objet de trois plans successifs qui ont permis de mettre en place de nombreux dispositifs, tels que les accueils de jour, les MAIA, les plateformes d'accompagnement et de répit. Malgré ce maillage national, il est à craindre que ces mesures ne soient pas suffisantes pour faire face au vieillissement de la population française. En 2020, un Français de plus de 65 ans sur quatre devrait être touché par la maladie d'Alzheimer. Et en 2040, quelques 2,4?millions de personnes devraient être en situation de dépendance?; et parmi celles-ci un nombre croissant d'individus souffrant de troubles cognitifs.

Sommes-nous à même d'en assumer les coûts financiers et sociétaux??

Dr A.B. - Selon une étude réalisée par la Fondation Médéric Alzheimer, le nombre de places en accueil de jour est passé de 740 en 2007 à 1?872 en 2017, soit +?153?% en 10 ans. Et pour les plateformes d'accompagnement et de répit, leur nombre est passé de 69 en 2011 à 194 en 2017 (soit +?181?% en 7 ans)... Cependant le taux d'équipement pour prendre en charge les malades âgés de 75 ans et plus ne répond pas aux besoins, la demande augmentant plus vite que l'installation de l'offre. D'où l'intérêt, parallèlement à la création d'établissements, de promouvoir autant que possible le soutien à domicile afin de reculer au maximum le moment de l'institutionnalisation. Mais encore faut-il en garantir le financement. Et c'est là que le bât blesse, puisqu'aucun des trois scenarii - une deuxième journée de solidarité qui viendrait compléter le lundi de Pentecôte, une augmentation de la fiscalité ou l'instauration d'une assurance dépendance - ne semble convenir. Deux études réalisées par la Fondation Médéric Alzheimer et la TNS SOFRES sur les comportements socio-patrimoniaux des Français ont d'ailleurs révélé que moins de 18?% de nos concitoyens prendraient une assurance dépendance sur une base volontaire. Sans entrer dans une logique de 5e risque, il convient donc d'imaginer un système d'assurance dépendance obligatoire qui permettrait de protéger les futurs aidants et qui serait à la fois inspiré des contrats d'assurance vie et de prévoyance afin de garantir systématiquement un capital. D'autres pistes tendent à "liquidifier" le patrimoine des Français comme le viager intermédié (partiel ou total)... Ainsi des personnes âgées pourraient financer les travaux d'aménagement nécessaires de leur habitat pour pouvoir rester le plus longtemps possible chez elles.

Pensez-vous, à l'instar du Pr Bruno Vellas, coordonnateur du Gérontopole de Toulouse, que davantage d'efforts doivent porter sur la prévention??

Dr A.B. - Oui, il est fondamental de développer une véritable politique de prévention afin de reculer autant que possible la survenue des premiers signes de la maladie d'Alzheimer. A titre d'exemple, si on repousse de cinq ans la survenue de la maladie, cela diminuerait de moitié le nombre de personnes malades. La prévention est l'une des clés du modèle économique à imaginer pour garantir le financement de la dépendance. Pour preuve?: les EHPAD eux-mêmes projettent désormais au domicile leurs ressources, soit en y organisant des ateliers individuels (sur la cuisine, la musique...), soit en faisant venir les personnes concernées non résidentes pour suivre en établissement des ateliers collectifs. Cette démarche présente en outre l'intérêt d'éviter une rupture dans le parcours de vie en créant un véritable continuum entre le domicile et l'établissement.

Quels programmes de recherche et d'innovation sociale devraient être lancés pour améliorer l'accompagnement des malades et des aidants familiaux et professionnels??

Dr A.B. - Convaincue que les traitements médicamenteux efficaces ne verront pas immédiatement le jour, la Fondation Médéric Alzheimer préconise de développer des axes de recherche au-delà du biomédical pour améliorer la qualité de vie et retarder la survenue des signes et donc l'aggravation de la maladie. Parmi ceux-ci, l'intervention psychosociale occupe une place de premier plan avec, pour exemples, le développement de l'orthophonie pour développer le langage para-verbal, la musicothérapie, l'art-thérapie ou encore la zoothérapie. Et dans tous les cas, il est préconisé d'associer la rigueur scientifique des chercheurs universitaires au pragmatisme des professionnels sur le terrain afin d'aider la société française à prendre le virage qui lui permettra de répondre efficacement au vieillissement cognitif.

En quoi le fait d'orienter la recherche vers les sciences humaines et sociales permettrait-il de faire évoluer la prise en charge et le regard porté sur la maladie d'Alzheimer??

Dr A.B. - Les sciences humaines et sociales constituent un champ très large incluant la sociologie, l'anthropologie, le droit, l'économie... Il est opportun d'orienter davantage la recherche vers les sciences humaines et sociales afin de mieux cerner la perception de la maladie d'Alzheimer par la société par exemple. C'est d'ailleurs l'une des conclusions du rapport que la Fondation Médéric Alzheimer a publié l'an dernier sur la perception de la maladie d'Alzheimer par les Français au travers de la culture et des médias. Cette pathologie fait toujours peur et reste taboue à titre individuel alors même qu'elle semble être acceptée au niveau sociétal. Il est donc essentiel de mieux comprendre la perception de la maladie d'Alzheimer à la fois par les professionnels, les aidants et la population.

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