Dans le n° 112-janvier 2020  -  Rapport parlementaire  10788

En attendant la loi Grand âge & Autonomie

Le 12 décembre 2019, la députée LREM Audrey Dufeu-Schubert a remis à Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé, son rapport « Réussir la transition démographique et lutter contre l'âgisme ». Plusieurs propositions sont jugées très positivement par les professionnels du secteur qui s'inquiètent toutefois du retard pris par le gouvernement dans la présentation du projet de loi « Grand âge et autonomie ».

Le rapport Dufeu-Schubert comporte pas moins de 85 propositions classées en six grands chapitres traitant des politiques locales, de l'approche domiciliaire, du changement de regard de la société sur les seniors, du renforcement des liens intergénérationnels, de la reconnaissance de la place des aînés dans la société et des « grandes transitions ». « C'est un inventaire à la Prévert avec des propositions intéressantes malheureusement parfois noyées au milieu d'autres, secondaires ou plus discutables, réagit Benoît Calmels, délégué général de l'Union nationale des centres communaux et intercommunaux d'action sociale (Unccas). En quoi par exemple l'installation de bureaux de vote dans les Ehpad changera-t-il le regard de la société sur le grand âge ? Par ailleurs, il faut arrêter de proposer l'écriture de chartes qui ne servent à rien ». Parmi les recommandations qui font consensus, celles qui ont trait à citoyenneté. « C'est un excellent travail, exprime Pascal Champvert, Président de l'Association des Directeurs au service des Personnes Agées (AD-PA). Nous demandions depuis longtemps une parole forte sur l'âgisme, Nos attentes n'ont pas été déçues car Audrey Dufeu-Schubert traite efficacement cette question fondamentale qui est une discrimination comme les autres mais qui est plus difficilement repérable. » « La personne âgée n'est plus perçue comme sujet mais comme citoyenne, note pour sa part Pierre Gouabault, Directeur de l'Ehpad public « La Bonne Eure » à Bracieux (Loir-et-Cher) qui cite en illustration la proposition de mettre en commun l'aide personnalisé d'autonomie (APA) et la prestation de compensation du handicap (PCH) pour un même foyer. « Le rapprochement de l'APA et de la PCH fait enfin prévaloir l'approche capacitaire sur l'approche par la perte. »

Grille AGGIR

Autre motif de (grande) satisfaction, la proposition d'intégrer dans la grille AGGIR « la prise en compte des différentes dimensions du projet de vie des personnes ». « Une excellente proposition, réagit Benoît Calmels. Il est urgent de sortir de l'approche purement médicale et de considérer les conditions de vie ainsi que la manière dont la personne âgée veut vivre ». « Le système de cotation par girage est totalement obsolète, confirme Pierre Gouabault. Nous devons réfléchir à sa transformation et à l'intégration d'éléments d'évaluation favorisant une approche positive de la prévention et du soutien à l'autonomie. »

L'approche domiciliaire préconisée par Audrey Dufeu-Schubert est également bien accueillie. « Elle doit prévaloir dans les établissements pour les personnes âgées que je ne veux plus appeler Ehpad, un acronyme affreux qui contient le terme de dépendance. Le premier élément d'une lutte contre la discrimination est le changement de vocabulaire, souligne Pascal Champvert. En établissement, la personne âgée doit être chez elle : les professionnels n'ont par exemple pas à entrer sans y avoir été invités ».

Et demain ?

Malgré ses 85 propositions, le rapport pêche toutefois, selon certains, par manque de vision prospective. « La question qui reste posée est celle du modèle des Ehpad, qui se médicalisent de plus en plus sans disposer des moyens affectés au secteur hospitalier, souligne Benoît Calmels. Deuxième question : A quoi ressemblera l'Ehpad de demain ? J'ai souvent le sentiment de relire les mêmes propositions depuis vingt-cinq ans. Nous restons figés sur le modèle actuel. C'est le jour de la marmotte !»

Si Pierre Gouabault salue un « changement de paradigme », il déplore la même absence de vision à moyen et long terme : « L'Ehpad apparaît clairement dans ce rapport comme un centre de ressources et un opérateur territorial sur la question de l'autonomie. Notre rôle sera d'optimiser la coordination des parcours entre le domicile « chef de file » et l'institution. Mais qu'attendons-nous de l'Ehpad dans sa fonction d'hébergement ? Chacun sait ce que devra être l'accompagnement à domicile demain mais qu'en est-il de l'Ehpad ? De la même manière que la loi HPST a précisé les missions de service public dans le champ de la santé, la future loi devra définir la mission de service public du grand âge et du soutien à l'autonomie ». Se pose également la question de l'avenir de ces propositions. « Ce rapport sort dans une période de grande tension sociale, rappelle Pascal Champvert. S'il s'agit d'alimenter la réflexion du gouvernement, c'est positif. S'il s'agit de repousser les décisions, c'est du cynisme et c'est inacceptable. Nous ne sommes pas rassurés de voir que le projet de loi annoncé pour 2019 est sans cesse reporté. Quand le gouvernement comprendra-t-il que l'aide aux personnes âgées est l'un des éléments du malaise social ? »

« Après les rapports Libault, El Khomry, Dufeu-Schubert, où en est la loi Grand âge et Autonomie ? interroge également Benoît Calmels. Nous sommes dans la déception totale. Le contexte social est certes compliqué mais nous aurions aimé que le gouvernement fasse valoir le « en même temps ».

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