CPOM, EPRD... Le secteur des EHPAD va connaître de fortes évolutions. Comment les managers doivent-ils être formés pour répondre à ces mutations ?

Les transformations profondes du secteur social et médico-social - les plus profondes sans doute que nous n'ayons jamais traversées - supposent des cadres et cadres dirigeants de haut niveau, formés à l'anticipation, et à la stratégie, dotés des instruments et des techniques pour une grande rigueur de gestion et qui soient en capacité d'écouter, d'innover et de décider... On peut définir trois actions dans la loi d'adaptation de la société au vieillissement (ASV) : une attente gestionnaire renforcée ; une maîtrise de la communication et de l'information ; la sécurité. Les EHPAD ont besoin de managers stratèges. D'un management réticulaire, qui travaille en réseau (filières gérontologiques, MAIA...). Les cadres deviennent des animateurs de réseau. Dans le contexte d'une forte incitation à la coopération, à la mutualisation, le directeur d'EHPAD devient un penseur, un philosophe de l'action, avec des capacités créatives pour anticiper, par exemple, le virage ambulatoire, la prévention.

Que répondez-vous à ceux qui dénoncent une dérive gestionnaire dans la formation des managers en EHPAD ?

Je ne partage pas ce discours. Les Ehpad sont dépositaires de fonds publics, il est donc logique d'adopter une démarche d'efficience économique pour les structures. Cela n'est pas en contradiction avec l'accompagnement humain des résidents, bien au contraire. Il faut transcender les clivages, les discours idéologiques. Certains projets d'entreprises à but lucratif ont des tonalités humanistes plus fortes que certains projets associatifs. L'éthique des pratiques se juge à l'aune de l'effectivité et pas à la déclaration d'intention. Les EHPAD ont besoin de managers penseurs, éclairés, à visage humain, dotés d'une vision prospective et qui sachent concilier grande rigueur méthodologique, souplesse des structures et des organisations.

Le secteur est-il prêt à engager ce qui ressemble à une "révolution culturelle" des pratiques ?

Oui, je pense qu'il y a eu un avant et un après les évaluations internes et externes. Les équipes sont familiarisées avec les évaluations externes qui ont valorisé dans la grande majorité des cas le travail effectué dans les EHPAD. Il y a une forte montée des compétences à tous les niveaux de la hiérarchie. Un écueil subsiste : le secteur a une culture de la participation et de la coopération, de la co-construction et manque de culture de la décision. Cela risque de rendre pour les managers la prise de décision plus difficile tout comme la gestion des conflits. Mais le passage au CPOM va conduire à une réinternalisation de l'allocation des ressources et l'aménagement des moyens, cela va changer la donne.