En quoi consiste le projet Demeter ?

Il est nécessaire de poser cette question dans le contexte. L'association d'aide à la personne ABRAPA, a porté un projet "TIC et santé" encouragé par le Conseil Général. Ce projet, baptisé DEMETER, a ouvert l'innovation sur 4 axes : Le lien social - La sécurisation de la personne et de son domicile - La coordination professionnelle grâce à la création d'un Dossier de Liaison Médico-social Partagé - L'ouverture vers la télémédecine à domicile. Une quinzaine de personnes âgées ont testé avec succès cette solution d'usages.

L'objectif de DEMETER est de maintenir le plus longtemps possible les personnes âgées et les personnes handicapées à domicile. Ce système introduit des technologies de l'information et de la communication dans l'aide à l'autonomie au maintien à domicile. Le dispositif permet

- d'une part aux personnes âgées de réactiver le lien social grâce à des outils comme la visiophonie et le courriel, et de faciliter la coordination entre les professionnels de santé intervenant à domicile. La personne soignée est équipée d'un écran tactile qui lui permet de communiquer avec sa famille, ses amis et l'équipe soignante, soit par visioconférence, soit par l'envoi d'e-mail. L'écran est adapté et personnalisé. En effet, il faut simplement cliquer sur la photo de la personne avec qui on veut communiquer pour établir une visioconférence. Pour envoyer un mail, la personne utilise un stylo numérique et une feuille sur laquelle se trouvent les photos et les noms de ceux à qui elle veut envoyer un message. Il lui suffit ensuite de cocher sur la personne concernée pour procéder à l'envoi.

- d'autre part l'Informatisation des documents du dossier de soins et du dossier d'aide sociale.
Le dossier médico-social partagé permet aux différents professionnels du maintien à domicile de noter les soins, actes (toilettes, repas, constantes telles que la TA, la glycémie, ...) ainsi que les diverses observations médicales ou paramédicales.

Il n'existe pas de "dossier médical partagé", en revanche, nous avons créé le Dossier de "Liaison Médico-social Partagé", pendant du Dossier Médical Personnel utilisé exclusivement par le corps médical.

Le Dossier de Liaison Médico-Social Partagé est notamment utilisé par le service de soins infirmiers à domicile et par le service d'aide à domicile. Il se présente sous forme d'une liasse de formulaires papier à remplir, disposé au domicile de la personne aidée.

Les différentes intervenants à domicile laissent des notes, écrivent des commentaires dans ces formulaires à la fin de leur visite. Ces intervenants utilisent en fait un stylo numérique connecté à internet. Ainsi, une fois la rédaction terminée et le stylo placé dans sa borne, les informations écrites se déversent via internet dans le dossier numérique de la personne géré par l'ABRAPA. Les responsables de l'association disposent ainsi de toute l'information qu'elle peut partager avec des ayants droits.

Quels sont les avantages de cet outil ?

Les avantages sont nombreux. Sachant que tout ce qui est rédigé - en toute simplicité puisqu'il s'agit d'utiliser un stylo et des formulaires papier - est stocké, archivé, et accessible. Il est remarquable pour les intervenants (aide à domicile, aides-soignantes, infirmiers, médecin, responsables) d'avoir accès à tout ce qui s'est passé et consigné au domicile de la personne. Cela permet d'anticiper et d'organiser les interventions à domicile, d'échanger avec les collègues intervenants alors qu'ils se croisent sans jamais se voir à domicile. Cela participe à prévenir des situations à risque dès lors que la situation de personne fragilisée par l'âge aura malheureusement évolué.
Parmi les documents et informations qui sont rendues accessibles aux ayants droits :
- Diagramme de soin
- Fiche d'observations du médecin
- Fiche d'observations infirmiers - aide soignants - assistante sociale - famille - aide à domicile - pédicure - kiné
- Le cahier de liaison pour les aides à domicile

Si ce dossier de liaison numérique était déployé, il permettrait l'accès des informations pour tous les patients ou bénéficiaires des services d'aide à domicile ou des SSIAD. Un peu comme le ferait un cadre de santé dans un service hospitalier.
Pour aller plus loin, il serait pertinent de relier en quelque sorte le Dossier de Liaison Médico-social Partagé avec le Dossier Médical Personnel. Une expérimentation dans l'expérimentation est actuellement réalisée à l'ABRAPA avec le GCS E-santé Alsace. Techniquement, cette liaison est parfaitement réalisable. Elle ouvre l'opportunité de regrouper une information particulièrement complète pour le corps médical, par exemple à l'occasion d'une hospitalisation, de l'établissement d'un diagnostic ...

Quelles sont les difficultés rencontrées lors de l'élaboration de ce projet ?

La difficulté était de trouver des patients volontaires pour tester le projet.
Des problèmes de réseaux pour utiliser le système : la clé 3G ne fonctionnait pas et nous avons été obligés de faire installer une ligne fixe.
La formation des personnes âgées et des intervenants à domicile n'a pas posé de problème particulier. C'est un projet qui a demandé un grand investissement au niveau du temps.
Les difficultés les plus importantes étaient d'ordre techniques. Elles ont été gérées par les partenaires du projet (Toshiba, Entela, Orange, Scanfile...), que j'ai dû souvent solliciter.

Enfin, cette expérimentation a soulevé un point très important puisque la confidentialité médicale a été mise en avant. En effet, l'hébergement et le traitement de données de santé est aujourd'hui réglementée et le projet n'a pas abordé cet aspect.
Le modèle économique n'a pas davantage été abordé pour aboutir sur une "industrialisation" de ce dispositif qui nécessite une liaison internet, un logiciel de gestion électronique des documents, un stylo numérique et un serveur de stockage des données.

Quelles sont les difficultés rencontrées pour coordonner les acteurs de santé ?

Il fallait consacrer du temps pour expliquer aux kinés, pédicures, médecins et infirmiers libéraux le fonctionnement du projet. Nous avons dû souvent nous déplacer pour leur montrer le fonctionnement du dispositif. La plus grande difficulté au quotidien, c'est que les médecins n'ont pas l'habitude d'écrire dans le dossier de liaison. Par exemple, sur 4 médecins, 1 était complètement opposé à ce projet et 1 autre a quand même écrit à plusieurs reprises dans le dossier.