Dans le n° 118-juillet 2020  -  Le temps d'après  11196

Construire une politique « post-covid » du Grand Âge : d'abord la prévention

La crise sanitaire que nous avons traversée a mis en avant les fragilités de la société française, en particulier un centralisme bureaucratique particulièrement peu efficace et une difficulté à prévoir les menaces. Dans le secteur de la santé, les fragilités furent encore plus criantes : opposition délétère entre le secteur sanitaire et le médico-social, culture focalisée sur l'hôpital public, manque de moyens humains pour accompagner les personnes les plus fragiles, invisibilité des professionnels, des aînés, des aidants...

D'une certaine façon, la crise sanitaire s'est doublée d'une crise morale.

Reste que cet épisode dramatique, dont les effets sur la santé -physique, morale, psychique- de la population comme des professionnels, vont se faire sentir durant des années, peut aussi apparaître comme un « moment care », comme l'an I de la prise en conscience de la Séniorisation de la société et de l'importance de tenir compte de la parole des personnes concernées. La création, en plein confinement, des Etats Généraux de la séniorisation de la société, avec la docteur en psychologie Véronique Suissa et le chirurgien Philippe Denormandie, entraînant un collectif de 60 acteurs, élus, personnes engagées et/ou anonymes, fut l'expression de l'émergence d'une société civile désireuse de (re)trouver du pouvoir d'agir.

La « découverte » de l'importance du soin et du care, la visibilité des métiers de l'accompagnement (enseignement, santé...), la mise en route du « Ségur de la santé », l'annonce de la création d'une cinquième branche de protection sociale pour le risque grand âge, la relance d'un projet de Loi Grand Age, sont autant de signes qui peuvent laisser penser que, en dépit de la crise écologique, sociale, culturelle et économique, nous allons peut-être collectivement construire une politique « post-covid » du Grand Âge.

La prévention à 360

Cette politique du Grand âge, impose de penser d'abord en termes de prévention. La prévention concerne la santé, mais aussi et tout autant, l'habitat, la formation, l'alimentation, l'activité physique, le lien social, la préparation à la retraite... Une politique de prévention concerne l'ensemble des générations et doit intervenir à tous les âges de la vie, à travers le parcours scolaire, l'entreprise, la commune, le bailleur social...

La prévention c'est aussi favoriser le vivre à domicile, qui reste une demande sociale ultra majoritaire. Cela impose autant d'accompagner l'amélioration de l'habitat que de développer des solutions de logement souples et adaptées à des besoins qui évoluent, à des désirs différents selon les seniors. Mais le vivre à domicile implique des services à la personne accessibles financièrement comme en termes d'usages. La prévention c'est un tout !

Serge Guérin

Professeur à l'Inseec GE, Directeur scientifique du Pôle Santé, Inseec MSC&MBA Auteur Les Quincados , Calmann-Lévy, 2019 et, en co-direction, Médecines Complémentaires et Alternatives. Pour et Contre ?, Michalon, 2019.

01/04/2024  - Partie III

Pas de société de la longévité sans volonté de valoriser les métiers du care

Dans les deux précédentes contributions autour de la valorisation des métiers de l'accompagnement des aînés les plus fragiles, nous évoquions les questions de management et d'évolution sociologique des manières d'aborder la vie professionnelle. Mais l'enjeu est aussi de repenser le fonctionnement administratif.
01/04/2024  - Chronique

Un café dans mon Ehpad!

Madeleine de Proust d'une France de carte postale, le café de village constitue souvent le seul lieu de rencontre et d'échange alors même que selon l'INSEE, 62 % des communes ne disposent plus d'aucun commerce.
01/04/2024  - Billet

Salut Richard

C'était d'abord une voix forte. Qui ouvrait des voies. Celles qu'il a défendues tout au long de sa carrière. Brillant et apprécié pour ses redoutables compétences lors des débats car travaillées constamment, méthodiquement, désintéressées et reconnues.  ...
01/03/2024  - Billet

Réjouissant de bon sens

Si j'étais taquin, j'aurais pu dire « décoiffant de bon sens ». Et Serge Guérin aurait su apprécier.  ...
01/03/2024  - Partie II

Pas de société de la longévité sans volonté de valoriser les métiers du care

Le vieillissement de la population implique de valoriser, d'accompagner et mieux rétribuer les professionnels de l'accompagnement des personnes fragiles. Une grande partie des métiers que l'on disait de vocation et qui relèvent aujourd'hui plutôt de l'engagement, pour éviter la notion religieuse et de sacrifice, ne trouvent plus preneurs.
01/02/2024  - Billet

L'espoir est dans la proximité

Bon, c'est désormais compris. Mais il en aura fallu du temps. Une grande majorité d'âgés veulent rester chez eux. Bien évidemment, la prise en compte de cette volonté n'était pas simple à structurer. Surtout lorsqu'on a fait le choix depuis des dizaines d'années d'un autre modèle reposant quasi exclusivement sur « l'établissement », par dogme ou conviction sincère, en particulier depuis 2003 et la grande canicule qui a traumatisé familles et politiques. ...
01/02/2024  - Partie I

Pas de société de la longévité sans valoriser les métiers du care

Répondre aux enjeux du vieillissement passera par la mise en oeuvre d'une société du care où l'accompagnement bienveillant et mutuel peut contribuer à sortir de la fragilité et aider chacun à devenir auteur de sa vie.
01/12/2023  - Billet

Vulnérables et capables

Fêter une ou un centenaire dans un établissement n'est plus une exception. Tant mieux. Pour autant, doit-on ne voir de cet âge, si souvent associé à une certaine déchéance, que cette facette festive et considérée comme une performance, accompagnée le plus souvent par les autorités et les médias locaux ? Il est d'autres réflexions qu'il faut considérer. Anne-Solen Kerdraon (théologienne à l'Institut catholique de Paris), dont le nom ne vous vient pas spontanément à l'esprit, évoque lors d'un échange (avec Clotilde Hamon, journaliste pour Famille chrétienne) cette séquence de la vie dont le philosophe Paul Ricoeur soulignait déjà ces deux particularités humaines : vulnérable et capable. ...
01/12/2023  - Partie II

Les «Fractures françaises» sont-elles une affaire d'âge?

À partir de l'étude « Fractures françaises », réalisée par Ipsos pour le Cevipof-Sc Po, nous avions le mois dernier constaté que les retraités sont plutôt plus confiants dans les institutions de la société que le reste de la population. Il apparaissait aussi que le critère social était bien plus prégnant que le fait générationnel pour expliquer les différences de ressentis.