Dans le n° 16-janvier 2012  -  Loi de financement de la Sécurité sociale 2012  586

Lire entre les chiffres

Si le budget 2012 de la "Sécu" est marqué du sceau de la rigueur, les personnes âgées ne sont pas les plus mal loties. Pourtant les regards des fédérations et syndicats sont partagés.

Le projet de Loi de financement de la Sécurité sociale pour 2012 a été voté début décembre. Le texte final annonce une progression de 4,2 % pour l'Objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) médico-social en 2012 (contre +3,8 % en 2011) et une hausse de 6,3 % pour l'Ondam médico-social pour les personnes âgées dépendantes. Soit 393,4 millions d'€ de mesures nouvelles.

Dans un contexte de crise économique, la nouvelle peut sembler bonne. Pourtant les représentants du secteur donnent une lecture contrastée du chiffre. " Dans le contexte économique, c'est plutôt bien, commente Didier Sapy, président de la FNAQPA (Fédération Nationale Avenir et Qualité de vie des Personnes Âgées). Les moyens sont réels, il ne s'agit pas de crédits recyclés ou de réserves CNSA. Sur le plan microéconomique, c'est une réduction des moyens. " A l'AD-PA (Association des Directeurs au service des Personnes Âgées), Pascal Champvert pointe une contradiction : " C'est un mauvais budget mais Roselyne Bachelot l'a bien défendu... L'ONDAM donne des crédits pour créer des structures nouvelles, pas pour augmenter les budgets. Il faut dire clairement la situation aux résidents et aux familles : avec ces moyens, nous ne pouvons pas assumer nos engagements. " De son côté, Claudy Jarry, président de la FNADEPA (Fédération Nationale des Associations de Directeurs d'Etablissements et services pour Personnes Âgées), soupire : " C'est mieux qu'en 2001 mais nettement insuffisant. En conséquence, même dans une année dite meilleure, on ne fonctionnera pas mieux. Les EHPAD sont en colère. Ils n'ont pas d'argent mais sont soumis à beaucoup d'attentes. Les équipes et les familles doivent s'exprimer ! " A la FEHAP (Fédération des Établissements Hospitaliers et d'Aide à la Personne, à but non lucratif), on regarde les choses autrement. " On se focalise trop sur les forfaits Soins, souligne David Causse. Dans les EHPAD, le tarif Hébergement représente 65 % des ressources ! Et dans certains établissements habilités à l'aide sociale, il est en baisse... "

140 millions d'€ pour les conventions tripartites 2e génération

Après une année de gel, le texte relance la signature des conventions tripartites de deuxième génération. " Les 140 millions qui sont dévolus à la médicalisation sont pour nous une excellente nouvelle, affirme Florence Arnaiz-Maumé, déléguée générale du SYNERPA (Syndicat National des Établissements et Résidences Privés pour Personnes Âgées). De plus l'arrêté qui débloque ces 140 millions vers les régions a déjà été signé par le gouvernement, les ARS peuvent donc négocier et signer. " Didier Sapy et Claudy Jarry sont plus réservés. " Avec cette somme, tout ne sera pas signé, remarquent-ils, il aurait fallu plus du double... "

0,8 % : le taux de revalorisation fait l'unanimité contre lui

" Cette revalorisation de 0,8 % est très insuffisante. Nos masses salariales évoluent environ de 2,5 % par an, ancienneté comprise, explique-t-on au Synerpa. 90 % de la dotation soins est consacrée au personnel, nous devons respecter des conventions collectives et un prix du marché bien plus élevé pour les aides soignantes et les infirmières ". " Compte tenu de l'évolution des coûts cela signifie moins de moyens qu'en 2011 ", renchérit Claudy Jarry. " Nous sommes perdants ! ", résume à son tour Pascal Champvert. " Il va manquer 1 à 2 points dans les budgets ", résume Didier Sapy. Pour être gagnant il faut donc soit signer une Convention Tripartite 2e génération soit diversifier son activité : PASA (pôles d'activités et de soins adaptés), Accueil de Jour, Accueil temporaire puisque le texte finance 75 nouvelles structures de répit et 600 PASA. " Attention de ne pas transformer les modes d'accompagnement en modes de financement, alerte le directeur de la FNAQPA. Le PASA doit être en phase avec le projet d'établissement et il faut réfléchir dans une logique de Territoire. " Reste que de toute façon les PASA ne trouvent aujourd'hui pas preneurs : le cahier des charges trop rigide et il impose des travaux lourds...

Expérimentations et dérogations tarifaires

L'article 67 (ex article 37) propose des expérimentations - sur la base du volontariat et pendant trois ans - sur les règles de tarification des EHPAD et ce dans le but d'améliorer la qualité et l'efficience des soins. La dotation soins sera calculée en fonction d'indicateurs qualité. " Les établissements ne peuvent être perdants : nous avons oeuvré pour remplacer la "modulation"prévue dans le texte initial par une "majoration", se réjouit David Causse. A la FHF (Fédération Hospitalière de France), on promet d'être vigilant. " Nous voulons des indicateurs temps sur les repas, la toilette..., indique Muriel Jamot, en charge du secteur social et médico-social. Ces indicateurs sont plus importants que les taux de chutes ou d'hospitalisation. " De son côté, le Synerpa réagit fortement. " Nous ne sommes pas contre la mesure mais contre son application aujourd'hui, alors qu'il existe tant de disparités dans les crédits d'assurance maladie, martèle la déléguée générale. On ne peut pas utiliser des indicateurs identiques pour des établissements dont les dotations varient de 1 à 3. Nous prônons l'application de la tarification à la ressource. "

Autre point-clé du texte 2012, l'expérimentation dans les territoires, prévue pour cinq ans (article 70). Il s'agit, dans le cadre de projets pilotes, de tester de nouveaux modes d'organisation des soins pour optimiser les parcours de soins des personnes âgées en risque de perte d'autonomie (prévenir l'hospitalisation...). Les ARS sont pilotes et l'expérimentation va démarrer en Ile-de-France et en Pays-de-Loire avec les acteurs innovants. " Si cela fonctionne et que cela implique le social, Médico-social, la médecine de ville, s'enthousiasme Muriel Jamot, on peut redessiner en profondeur l'organisation de la santé. " Reste que pour l'heure les crédits ne sont pas fléchés.

Marie-Suzel Inzé

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