Dans le n° 108-septembre 2019  10615

Les Médecines Complémentaires et Alternatives pour l'accompagnement des aînés

Le besoin de liens, d'attention, de prise en considération ne disparaissent pas avec l'avancée en âge. Bien au contraire !

Face à des fragilités croissantes, au vieillissement de la population et à la hausse des maladies chroniques, la cure a besoin d'être fortement complétée par le care. Il ne s'agit pas seulement de soigner et guérir, mais d'accompagner, d'améliorer la qualité de vie, de lutter contre les effets délétères de la maladie... Or, notre système reste trop marqué par la médicalisation en laissant trop de côté le pouvoir d'agir de chacun sur son bien-être.

Vers une nouvelle médecine

L'attention à sa santé se diversifie en fonction des contextes sociaux et culturels, des parcours biographiques et des personnalités. Elle déborde sur la prévention et sur une recherche de qualité de vie et de bien être.

Face à ces dynamiques nouvelles et fortes, la médecine scientifique ne sait pas nécessairement répondre à l'ensemble des attentes et des recherches de bénéfices thérapeutiques. Elle n'est pas nécessairement outillée pour une pratique du soin relationnel demandé par les patients. Les professionnels ne sont pas formés ni préparés à cela. C'est dans ce contexte que l'on assiste à une dynamique nouvelle autour des médecines complémentaires et alternatives (MCA)1. La diversité des pratiques répond à la pluralité des situations, des attentes, des imaginaires et des besoins. Dans un moment où nombre de personnes se sentent fragilisées, la médecine scientifique a perdu son monopôle du soin légitime. Les MCA offrent une diversité de méthodes, approches, démarches destinées à améliorer la situation des patients.

Un besoin de considération

Le développement des MCA, c'est aussi la marque d'un désir au sein de la société, et y compris par et pour les plus âgés, d'être mieux pris en compte et plus écoutés. Si le soutien aux plus âgés est très largement marqué par une approche médicalisée, par une culture du médicament, le mouvement en faveur des MCA montre que les mentalités évoluent. Déjà, les thérapies non médicamenteuses prennent place dans les établissements. La Fondation Korian pour le Bien-vieillir en a fait, par exemple, un de ses axes majeurs. Le développement des PASA, avec ses limites, ou le développement de l'activité physique adaptée, dont Siel Bleu fut le pionnier, sont de belles manifestations de ces évolutions récentes.

Vers une liberté retrouvée

Dans quelle mesure l'émergence des MCA n'est-elle pas aussi l'expression de ce besoin de care ? Le recours croissant à ces approches thérapeutiques ne marque-t-elle pas une recherche de plus de liberté dans les choix de santé, une façon de s'inscrire dans une logique où la perte d'autonomie ne rime pas avec la perte de liberté ? Les MCA ne sont-elles pas un signe de cette tendance grandissante en faveur de tout ce qui apparaît comme naturel. Ces thérapies relationnelles ne sont-elles pas aussi liées à un retour des croyances, religieuses ou non, à la recherche de solutions et pratiques parfois ancrées dans la magie voire l'approche sectaire ?

Le recours, sous différentes façons, à ces médecines qui envisagent l'être humain dans sa globalité, peut se comprendre comme une volonté de reprendre la main sur sa santé, mais aussi sur son bien-être. L'accompagnement des seniors peut s'enrichir d'une mobilisation adaptée de certaines MCA, y compris dans les lieux d'accueil des aînés.

Serge Guérin

Professeur à l'INSEEC SBE et directeur du MSc « Directeur des établissements de santé ». Il vient de publier « Les Quincados », Calmann-Lévy


01/04/2024  - Partie III

Pas de société de la longévité sans volonté de valoriser les métiers du care

Dans les deux précédentes contributions autour de la valorisation des métiers de l'accompagnement des aînés les plus fragiles, nous évoquions les questions de management et d'évolution sociologique des manières d'aborder la vie professionnelle. Mais l'enjeu est aussi de repenser le fonctionnement administratif.
01/04/2024  - Chronique

Un café dans mon Ehpad!

Madeleine de Proust d'une France de carte postale, le café de village constitue souvent le seul lieu de rencontre et d'échange alors même que selon l'INSEE, 62 % des communes ne disposent plus d'aucun commerce.
01/04/2024  - Billet

Salut Richard

C'était d'abord une voix forte. Qui ouvrait des voies. Celles qu'il a défendues tout au long de sa carrière. Brillant et apprécié pour ses redoutables compétences lors des débats car travaillées constamment, méthodiquement, désintéressées et reconnues.  ...
01/03/2024  - Billet

Réjouissant de bon sens

Si j'étais taquin, j'aurais pu dire « décoiffant de bon sens ». Et Serge Guérin aurait su apprécier.  ...
01/03/2024  - Partie II

Pas de société de la longévité sans volonté de valoriser les métiers du care

Le vieillissement de la population implique de valoriser, d'accompagner et mieux rétribuer les professionnels de l'accompagnement des personnes fragiles. Une grande partie des métiers que l'on disait de vocation et qui relèvent aujourd'hui plutôt de l'engagement, pour éviter la notion religieuse et de sacrifice, ne trouvent plus preneurs.
01/02/2024  - Billet

L'espoir est dans la proximité

Bon, c'est désormais compris. Mais il en aura fallu du temps. Une grande majorité d'âgés veulent rester chez eux. Bien évidemment, la prise en compte de cette volonté n'était pas simple à structurer. Surtout lorsqu'on a fait le choix depuis des dizaines d'années d'un autre modèle reposant quasi exclusivement sur « l'établissement », par dogme ou conviction sincère, en particulier depuis 2003 et la grande canicule qui a traumatisé familles et politiques. ...
01/02/2024  - Partie I

Pas de société de la longévité sans valoriser les métiers du care

Répondre aux enjeux du vieillissement passera par la mise en oeuvre d'une société du care où l'accompagnement bienveillant et mutuel peut contribuer à sortir de la fragilité et aider chacun à devenir auteur de sa vie.
01/12/2023  - Billet

Vulnérables et capables

Fêter une ou un centenaire dans un établissement n'est plus une exception. Tant mieux. Pour autant, doit-on ne voir de cet âge, si souvent associé à une certaine déchéance, que cette facette festive et considérée comme une performance, accompagnée le plus souvent par les autorités et les médias locaux ? Il est d'autres réflexions qu'il faut considérer. Anne-Solen Kerdraon (théologienne à l'Institut catholique de Paris), dont le nom ne vous vient pas spontanément à l'esprit, évoque lors d'un échange (avec Clotilde Hamon, journaliste pour Famille chrétienne) cette séquence de la vie dont le philosophe Paul Ricoeur soulignait déjà ces deux particularités humaines : vulnérable et capable. ...
01/12/2023  - Partie II

Les «Fractures françaises» sont-elles une affaire d'âge?

À partir de l'étude « Fractures françaises », réalisée par Ipsos pour le Cevipof-Sc Po, nous avions le mois dernier constaté que les retraités sont plutôt plus confiants dans les institutions de la société que le reste de la population. Il apparaissait aussi que le critère social était bien plus prégnant que le fait générationnel pour expliquer les différences de ressentis.