Dans le n° 52-janvier 2015  -  Découpage des régions  4434

La République a besoin de territoires cohérents

La réforme des Régions est sur les rails. Du moins sur le papier. Il y a une certaine logique à vouloir regrouper des entités pour le rendre plus efficaces et tenter de réduire les coûts de gouvernance. C'est moins évident de coupler cet élargissement avec la mise en cause des départements. Dans un monde mondialisé, les individus ont besoin de territoires solidaires et de liens sociaux de proximité.

D'abord pour une raison de mécanique sociale qui veut que plus le monde s'élargit et se durcit, plus nous avons besoin d'un ancrage culturel, de lien social, de sécurité. Ensuite, parce que le soutien, vital, au développement économique et à l'emploi passe par des politiques de proximité prenant en compte les besoins locaux et le type de qualification des populations. Il importe que le territoire ait une envergure suffisante afin que des mutualisations soient pertinentes et efficaces. Enfin, plus le territoire concerné sera homogène et à dimension humaine, et mieux ce sera un espace pertinent pour expérimenter, tenter, innover, inventer une société qui soit plus économe des ressources naturelles et des deniers publics, tout en permettant d'accompagner les personnes en fragilité, en particulier les personnes très âgées, dont le nombre va tripler dans les 30 ans qui viennent.

Un territoire solidaire repose sur une culture de la mutualisation des actions et des expériences. C'est aussi un espace où la rencontre se produit et où l'habitude de travailler ensemble favorise l'efficacité. Un territoire solidaire associe l'ensemble des acteurs autour d'une vision commune.

La dimension senior

Les choses bougent. Face à la transition démographique, en termes de besoins des populations et d'opportunités de développement (silver economie), le développement de structures comme le Gérontopole des Pays de Loire, ou bientôt celui de Champagne-Ardenne, marque bien cette nouvelle approche territoriale où l'ensemble des acteurs d'une filière se retrouvent et coopèrent. De même, le réseau Villes Amies des Ainés regroupe des communes qui développent et mutualisent une démarche globale de prise en compte de la dimension senior. De leur côté des Départements multiplient les initiatives comme en Essonne où un service public des maisons de retraite a été mis en oeuvre ou dans la Nièvre qui à travers la dynamique "Bien vieillir en Nièvre" stimule et fédère quantités d'initiatives sur l'ensemble du territoire en direction des seniors. Tandis que le Conseil Départemental du Lot et Garonne expérimente le baluchonnage comme solution de répit pour les aidants bénévoles. Pour sa part le conseil général du Tarn a lancé L'Autabus qui, avec les bénévoles de la Croix Rouge, va au devant des populations en forte précarité et en déficit de mobilité.

L'Acte III de la décentralisation ouvre vers les métropoles. Il y a, en effet, une logique à ce que les territoires hyper urbains et connectés à la mondialisation intègrent une gouvernance rassemblée. Encore ne faut-il pas minorer les obstacles et les coûts cachés de ce genre d'entreprise. Par ailleurs, pour les 60% de la population vivant dans des territoires éloignés des grands centres, la logique départementale propose un échelon pertinent pour développer une vision à moyen et long terme, définir les priorités et mobiliser les acteurs.

Le défi se joue sur les territoires et passera par la mutualisation des services publics, la démocratisation de l'accès au numérique, le soutien à la formation professionnelle, la priorité donnée à la prévention (santé, habitat...), la coopération entre les acteurs (collectivités, Economie sociale et solidaire, bailleurs sociaux, associations, retraités bénévoles, entreprises et artisans... ), le droit à l'expérimentation... L'innovation de proximité est notre chance!

Serge Guérin

Professeur à l'ESG-Management School

Dernier ouvrage: " La solidarité ça existe... et en plus ça rapporte ! ", Michalon

01/04/2024  - Partie III

Pas de société de la longévité sans volonté de valoriser les métiers du care

Dans les deux précédentes contributions autour de la valorisation des métiers de l'accompagnement des aînés les plus fragiles, nous évoquions les questions de management et d'évolution sociologique des manières d'aborder la vie professionnelle. Mais l'enjeu est aussi de repenser le fonctionnement administratif.
01/04/2024  - Chronique

Un café dans mon Ehpad!

Madeleine de Proust d'une France de carte postale, le café de village constitue souvent le seul lieu de rencontre et d'échange alors même que selon l'INSEE, 62 % des communes ne disposent plus d'aucun commerce.
01/04/2024  - Billet

Salut Richard

C'était d'abord une voix forte. Qui ouvrait des voies. Celles qu'il a défendues tout au long de sa carrière. Brillant et apprécié pour ses redoutables compétences lors des débats car travaillées constamment, méthodiquement, désintéressées et reconnues.  ...
01/03/2024  - Billet

Réjouissant de bon sens

Si j'étais taquin, j'aurais pu dire « décoiffant de bon sens ». Et Serge Guérin aurait su apprécier.  ...
01/03/2024  - Partie II

Pas de société de la longévité sans volonté de valoriser les métiers du care

Le vieillissement de la population implique de valoriser, d'accompagner et mieux rétribuer les professionnels de l'accompagnement des personnes fragiles. Une grande partie des métiers que l'on disait de vocation et qui relèvent aujourd'hui plutôt de l'engagement, pour éviter la notion religieuse et de sacrifice, ne trouvent plus preneurs.
01/02/2024  - Billet

L'espoir est dans la proximité

Bon, c'est désormais compris. Mais il en aura fallu du temps. Une grande majorité d'âgés veulent rester chez eux. Bien évidemment, la prise en compte de cette volonté n'était pas simple à structurer. Surtout lorsqu'on a fait le choix depuis des dizaines d'années d'un autre modèle reposant quasi exclusivement sur « l'établissement », par dogme ou conviction sincère, en particulier depuis 2003 et la grande canicule qui a traumatisé familles et politiques. ...
01/02/2024  - Partie I

Pas de société de la longévité sans valoriser les métiers du care

Répondre aux enjeux du vieillissement passera par la mise en oeuvre d'une société du care où l'accompagnement bienveillant et mutuel peut contribuer à sortir de la fragilité et aider chacun à devenir auteur de sa vie.
01/12/2023  - Billet

Vulnérables et capables

Fêter une ou un centenaire dans un établissement n'est plus une exception. Tant mieux. Pour autant, doit-on ne voir de cet âge, si souvent associé à une certaine déchéance, que cette facette festive et considérée comme une performance, accompagnée le plus souvent par les autorités et les médias locaux ? Il est d'autres réflexions qu'il faut considérer. Anne-Solen Kerdraon (théologienne à l'Institut catholique de Paris), dont le nom ne vous vient pas spontanément à l'esprit, évoque lors d'un échange (avec Clotilde Hamon, journaliste pour Famille chrétienne) cette séquence de la vie dont le philosophe Paul Ricoeur soulignait déjà ces deux particularités humaines : vulnérable et capable. ...
01/12/2023  - Partie II

Les «Fractures françaises» sont-elles une affaire d'âge?

À partir de l'étude « Fractures françaises », réalisée par Ipsos pour le Cevipof-Sc Po, nous avions le mois dernier constaté que les retraités sont plutôt plus confiants dans les institutions de la société que le reste de la population. Il apparaissait aussi que le critère social était bien plus prégnant que le fait générationnel pour expliquer les différences de ressentis.