Dans le n° 134-décembre 2021  -  Pierre Parneix, Président de la Société française d'hygiène hospitalière (SF2H)  12402

« C'est maintenant qu'il faut continuer à être vigilant, à transmettre les bonnes pratiques d'hygiène »

Tout juste réélu à la présidence de la SF2H, Pierre Parneix livre à Géroscopie ses enseignements de la crise Covid et ses perspectives pour continuer de sensibiliser aux pratiques d'hygiène. Interview.

Vous venez d'être réélu à la présidence de la Société française d'hygiène hospitalière (SF2H). Quels sont les enjeux à venir ?

Nous finalisons actuellement des propositions d'actions sur les grands axes stratégiques d'un nouveau programme national de prévention des infections liées aux soins et pour l'usage des antibiotiques, en collaboration avec le ministère de la Santé. Nous réfléchissons ainsi à la place et au positionnement des équipes mobiles d'hygiène, qui peuvent, on l'a vu pendant la crise Covid, jouer un rôle important en Ehpad. Reste à savoir comment les structurer, où les déployer pour couvrir l'ensemble du territoire, en limitant au maximum leurs déplacements, et trouver des financements pérennes. Nous allons rendre notre saisine dans les prochains jours au ministère. Nous n'obtiendrons pas gain de cause sur tout mais cette réflexion permet de préciser les enjeux et moyens à mettre en oeuvre pour bien travailler avec ces structures. On note un réel intérêt pour ces dispositifs en Ehpad, qui ont été très isolés pendant la crise.

Certaines régions, comme Auvergne-Rhône-Alpes et Bourgogne-Franche-Comté, sont en avance. En Nouvelle Aquitaine, les équipes mobiles existent depuis trois ans seulement. Les dispositifs commencent à s'étendre mais de manière hétérogène. Certaines régions n'en ont toujours pas. Il faut donc en installer sur tout le territoire, et au fur et à mesure étendre la couverture pour que le maximum d'Ehpad bénéficie d'une ressource. Certains groupes ont une autonomie mais la plupart des structures sont petites et ont besoin de se fédérer. Pour la première fois, on devrait obtenir des fonds pérennes du ministère. On envisage aussi que les établissements participent au prorata de leur utilisation. La crise Covid a révélé ce besoin de manière criante et démontré l'efficacité comme l'utilité de ces équipes. Aujourd'hui il est clair que les établissements réinterrogent leur organisation.

Travaillez-vous aussi sur la qualification des personnels ?

Nous militons en effet pour la création de pratiques avancées infirmières en prévention et contrôle de l'infection et antibiorésistance. Cela nous semble important. Créer des spécialités n'était pas l'idée de départ, même si on voit, à l'usage, que les pratiques avancées peuvent s'appliquer à toutes les disciplines. Il y a des débats. Mais nous défendons sa nécessité, notamment pour les patients fragiles, sensibles aux risques infectieux, du fait de leur âge ou de polypathologies. Il faut aller davantage à leur rencontre, en déléguant certains actes médicaux (contrôle de portage de micro-organismes, validation des tests de dépistage, mise en place de mesures d'isolement, évaluation de la pertinence du maintien de voies veineuses ou de sondes urinaires). Les diplômes de pratiques avancées permettent de véhiculer une culture infirmière dans le secteur médico-social. Il faut militer, faire évoluer la discipline et proposer ainsi des perspectives d'évolution de carrière.

Est-ce une volonté des professionnels ?

Il y a un désir paramédical de reconnaissance de cette activité, la spécialité étant la reconnaissance ultime mais le ministère ne veut pas en créer de nouvelles. C'est dès lors intéressant d'explorer de nouvelles voies. Se former, compléter son expertise notamment par un master permet, au-delà de la reconnaissance, des revalorisations salariales.

On sait que les effectifs médicaux ne vont pas augmenter dans l'avenir et qu'il est difficile d'attirer de nouveaux professionnels dans cette discipline. Alors que dans le même temps, les besoins vont aller croissants à l'hôpital comme en ville. Il est donc pertinent de former des professionnels capables d'identifier et de lutter contre les infections.

Comment maintenir une vigilance aux gestes d'hygiène dans la population ?

Dans le cadre de la mission Pittet, nous avons proposé la création d'un Observatoire des pratiques de prévention dans la population générale, sous l'égide de Santé publique France. Il y a un vrai enjeu à capitaliser l'existant. On a déjà beaucoup régressé. Or c'est maintenant qu'il faut continuer à être vigilant, à transmettre les bonnes pratiques d'hygiène, pour limiter la transmission de nombreuses pathologies (gastro-entérites, grippes, bronchiolites...). Se laver les mains et porter des masques en cas de maladie reste la base.

Du côté des soignants, on a observé un regain des gestes d'hygiène pendant la crise Covid. Mais là encore il faudra le maintenir. Le rôle de la SF2H peut être justement de valoriser les innovations. Tous les fabricants de solutions hydroalcooliques ont développé des solutions d'évaluation automatique de la consommation de produit, voire même de l'observance de l'hygiène des mains grâce à des systèmes de capteurs adaptés autour du lit du patient ou sur les professionnels eux-mêmes (dans un sabot ou autour d'un ordinateur). Aujourd'hui leur taux d'utilisation est quasi nul. Ces chiffres devraient être connus des équipes d'hygiène, non pas pour persécuter les gens mais pour adapter les stratégies et anticiper avant que l'épidémie n'arrive. On se heurte au manque de culture de prévention française. Investir des dizaines de milliers d'euros dans des dispositifs pour couvrir un établissement de santé va paraître infaisable quand on les dépense en dix minutes pour un nouveau traitement. Et ce, même si le discours national est très volontariste autour de la prévention. Il faudrait des lignes d'investissements régionales ciblées.

Vous avez été très actif au sein de la commission hygiène pendant la crise Covid. Quels enseignements tirer de cette période ?

C'est une aventure complexe à laquelle personne n'était préparé. Le risque infectieux avait été abandonné depuis près de dix ans. Les précédentes épidémies nous avaient épargnées et nos plans « pandémie » étaient inadaptés, insuffisants. On avait donc un gros handicap de départ. On a été parmi les pays frappés en premier. On peut reconnaître que notre système de santé s'est montré assez fort mais il s'est effrité au fur et à mesure. Nous avons constaté les faiblesses du milieu médico-social comparé aux Allemands qui disposent d'infirmières de pratiques avancées en gériatrie, de médecins généralistes réquisitionnables pour aller travailler en Ehpad, d'une évaluation externe annuelle de la performance... L'exécutif français a pourtant su s'adapter malgré ces handicaps. La vaccination qui cumulait toutes les difficultés, finit aujourd'hui avec un très haut taux même si se pose maintenant la nécessité de la 3e dose.

Cette réussite n'efface pas nos problèmes structurels, dont un ministère de la Santé considéré comme faible au niveau national. II s'est affaibli en central au profit d'une multitude d'agences régionales, indépendantes. Ce ministère doit se refonder. Il faut l'aider à avoir plus d'expertises et des liens plus fluides avec ses agences.


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