Dans le n° 98-novembre 2018  - Financement  10158

Réforme tarifaire des EHPAD : encore des hics et des couacs

Le mécanisme provisoire de neutralisation des effets négatifs de la réforme de la tarification des EHPAD - préconisé par Pierre Ricordeau et acté par la circulaire budgétaire - fonctionne-t-il sur le terrain ? Du côté des agences régionales de santé et des conseils départementaux, ça coince encore, notamment dans l'attribution de financements complémentaires aux EHPAD en difficultés.

Exit du calendrier, les réunions de travail entre l'État, l'Assemblée des départements de France (ADF) et les principales fédérations représentant les gestionnaires d'EHPAD qui devaient aboutir « à un ajustement du décret relatif au tarif dépendance » à l'automne. Ce wagon a été raccroché à la locomotive de la concertation nationale "grand âge et autonomie", lancée sur les rails le 1er octobre, et qui étudiera toutes les questions relatives au financement de la dépendance. Si le mécanisme provisoire de neutralisation pour 2018 et 2019 des effets de la réforme de la tarification des EHPAD est censé accorder un temps de répit au secteur, d'aucuns craignent un retour de flamme en 2020, si la question n'est pas réglée. Lors du dernier comité de suivi de la réforme de la tarification et de la contractualisation des EHPAD, le 27 septembre, la Fédération hospitalière de France (FHF) a rappelé «la nécessité de lever sans délai les incertitudes en matière de ressources des établissements » et a souligné que l'adaptation du décret tarifaire dépendance « reste une attente forte ».

Ce comité a été l'occasion de faire le point sur les mesures de neutralisation, préconisées par le rapport de Pierre Ricordeau (1), et dont la mise en oeuvre opérationnelle a été actée dans la circulaire budgétaire 2018. Le bilan est mitigé : certains points avancent mais d'autres coincent encore. « Une majorité de départements a continué à appliquer la convergence négative sur la dépendance. Pour ces 86 départements, il y a bien eu une compensation financière de la part des agences régionales de santé », explique Clémence Lacour, responsable relations institutionnelles à la Fédération nationale avenir et qualité de vie des personnes âgées (Fnaqpa). Autre point positif : le comité de suivi a fait part d'une accélération du renouvellement des coupes Pathos et des GMP. Pour rappel, le rapport Ricordeau avait établi que les difficultés rencontrées par certains EHPAD provenaient de l'obsolescence des coupes Pathos et du GMP. « Il y a une résorption des PMP obsolètes et les nouveaux PMP sont d'un niveau supérieur grâce à une amélioration du codage. D'après les remontées chiffrées, il y a 54% des PMP qui ont une ancienneté inférieure à trois ans et 89 % de PMP dont l'ancienneté est inférieure à six ans. Et 92% des GMP ont moins de six ans et 55% ont moins de trois ans », précise Clémence Lacour.

Pas de bouffée d'oxygène

En revanche, entre certaines annonces et leur mise en oeuvre sur le terrain, il y a de la marge. Alors que 29 millions d'euros de financements complémentaires ont été spécifiquement fléchés sur la neutralisation des effets négatifs des convergences dépendance et soins pour l'année 2018 et pour l'appui aux EHPAD mis en difficulté par la convergence à la baisse de leur forfait dépendance et qu'une enveloppe de 50 millions d'euros est dédiée notamment à « aider à l'investissement », les agences régionales de santé (ARS) ont du mal à délier les cordons de leurs bourses et à octroyer ces crédits - et donc cette bouffée d'oxygène - aux établissements. « Les ARS sont frileuses à accorder des financements complémentaires dans le cadre des CPOM [contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens] et hors CPOM », explique Clémence Lacour. Idem du côté des départements. « Les conseils départementaux vivent toujours dans la crainte d'une augmentation de la valeur de référence de leur point GIR. La Direction générale de la cohésion sociale [DGCS] a donc rappelé que les départements ont la possibilité d'accorder des financements complémentaires sans que cela ne vienne forcément s'incrémenter dans la tarification des établissements, l'année suivante », poursuit-elle.

Peu de signatures de CPOM

S'il demeure des hics et des couacs au niveau de la neutralisation de la convergence négative, ça patine aussi du côté de la contractualisation. Ainsi, l'administration centrale a reconnu un retard dans le calendrier de programmation des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM). Si la DGCS prévoyait la signature de 1055 CPOM en EHPAD en 2017, seuls 770 contrats ont été conclus. Pour 2018, le nombre de CPOM signés au 30 juin - secteur du handicap compris - est de seulement 312 sur les 1 732 programmés, ce qui représente un taux de 18% de l'objectif fixé.

« Ces retards pénalisent fortement les établissements qui, même lorsqu'ils se voient allouer une revalorisation des enveloppes budgétaires, sont contraints à un étalement de ces ressources sur cinq ans, alors que la reconnaissance de la charge de travail a bien été actée par la validation des GIR et des coupes Pathos », souligne le Syncass-CFDT. Le CH-FO pointe du doigt « le danger de CPOM non négociés, imposés par les ARS » et s'interroge sur « la teneur réelle de la négociation des contrats lorsque la pression pour obtenir le nombre de signatures est si forte ». Le syndicat déplore également « que de nombreux CPOM se contentent de lister les obligations légales contenues dans la loi 2002-2 et le droit du travail ».

Enfin, les acteurs du secteur gardent un oeil attentif sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) 2019 qui doit concrétiser les engagements de la feuille de route "Grand âge et autonomie". L'article 41 du texte met en oeuvre l'accélération de la convergence tarifaire du forfait "soins" en faisant passer la période de transition à 5 ans (au lieu de 7 ans). L'application de cette mesure devrait permettre aux EHPAD de percevoir, sur la période 2019-2021, 143 millions d'euros supplémentaires (en plus des 217 millions d'euros déjà programmés). Pour le Syncass-CFDT, cette accélération de la convergence pour les dotations soins pourrait paraître positive, « si les montants en étaient correctement revalorisés ». « Mais de tous les sous-objectifs de l'ONDAM, c'est celui de l'enveloppe médico-sociale (personnes âgées et handicapées) qui augmentera le moins, à 2,2%. Comment alors accompagner et soigner convenablement et ne pas user les équipes ? », interroge le syndicat de directeurs de l'hospitalière. Une question qui attend de trouver sa réponse lors de ces quatre mois de concertation nationale "grand âge et autonomie".


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