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08/09/2025  - Ehpad  18253

Médecins-coordonnateurs : le décret de la colère

Un décret modifie les missions des médecins coordonnateurs en Ehpad, prévoit les modalités du recours à la télécoordination et définit le rôle des Idec. Le texte est jugé « inacceptable » par Dr Pascal Meyvaert, président du syndicat SMCG-CSMF.


Un décret publié le 6 septembre actualise l'article D 312-158 du code de l'action sociale et des familles (CASF) concernant les 14 missions des médecins-coordonnateurs :

- Ajout de l'élaboration d'un programme de prévention à côté du projet général de soins (mission 1);

- Suppression de l'ancienne mission 9 (élaboration d'un dossier type de soins) avec renumérotage des suivantes en 9 à 13 au lieu de 10 à 14 ;

- Future définition du contenu du rapport annuel d'activité médicale qui fera l'objet d'une remontée au niveau national auprès de la CNSA, en vue d'un traitement de données automatique (mission 9, ex 10);

- Ajout de l'utilisation des services numériques socles nationaux, MSS, Viatrajectoire... (mission 10, ex-11).

Médecin-co/médecin traitant

Mais UNE nouvelle disposition est en train de remettre une pièce dans la machine (voir ci-après). En application de l'article 12 de la loi dite Valletoux du 27 décembre 2023 qui ouvre le rôle de médecin traitant aux médecins coordonnateurs, le décret ajoute un alinéa à la mission 12 (ex-13) :« Le médecin coordonnateur peut assurer le suivi médical des résidents qui le souhaitent, et réaliser pour ceux-ci des prescriptions médicales ». Jusque-là, seules des conditions d'urgence, de risque vital ou de carence du médecin traitant pouvaient justifier des prescriptions médicamenteuses ou tout acte médical de sa part.

Par ailleurs, un ajout à l'article D. 312-159-1 stipule que, « le cas échéant », le contrat entre le médecin coordonnateur et l'Ehpad doit préciser le temps de présence consacré au suivi médical des résidents ainsi que le nombre de résidents suivis.

La télécoordination en attente d'arrêté

Le décret insère par ailleurs une disposition dans l'article D 312-158 : en cas d'impossibilité pour l'Ehpad de disposer du temps de coordination prévu à l'article D. 312-156, l'Ehpad peut recourir à un médecin coordonnateur « intervenant de façon dématérialisée » et « pour une durée limitée », dans des conditions que fixera un arrêté. L'Ehpad doit préalablement informer l'ARS du recours à ce mode d'intervention.

Du côté des Idec

L'article 2 de loi du 27 juin 2025 sur la profession d'infirmier (Géroscopie juillet-août 2025 pages 10 et 11) prévoit que le personnel des Ehpad peut comprendre une infirmière coordonnatrice (Idec) exerçant en collaboration avec le médecin coordonnateur et en lien avec l'encadrement administratif et soignant de l'établissement.

Le décret du 4 septembre confirme réglementairement la place de l'ldec via un nouvel article D. 312-158-1: sous la responsabilité et l'autorité administratives du responsable de l'établissement, et sous l'autorité du cadre de santé le cas échéant, l'Idec « participe » à la coordination de l'équipe paramédicale, à l'organisation et à la qualité des soins paramédicaux réalisés par l'équipe soignante et contribue aux projets d'amélioration continue de la qualité des soins. Elle « concourt » à l'exercice des missions des médecins coordonnateurs mentionnées aux 1°, 2°, 4°, 5°, 8° et 10° de l'article D. 312-158:

Un décret « inacceptable » pour le SMCG-CSMF

Les syndicats de médecins-coordonnateurs n'ont pas été prévenus de la publication de ce décret par le cabinet de la ministre.

« La fin du métier de médecin coordonnateur en Ehpad », s'indigne le Dr Pascal Meyvaert, président du SMCG-CSMF qui a réagi à chaud pour Géroscopie : « Nous nous retrouvons quasiment mot pour mot, sauf quelques modifications à la marge, avec la version de 2024 que nous avons dénoncée et combattue tous autant que nous sommes. Malgré plusieurs relances du ministère faite par mes soins depuis février 2024, restées sans réponse sauf à la mi-juillet 2025 où nous avons été reçus par le cabinet de la ministre, les représentants des médecins coordonnateurs en Ehpad n'ont absolument pas été écoutés. C'est donc sans hésiter au nom du SMCG-CSMF que j'affirme que ce décret est inacceptable pour la profession. J'avais à de multiples reprises alerté les pouvoirs publics sur le risque de signer la fin du métier de médecin coordonnateur en Ehpad avec une perte qualitative pour les résidents d'Ehpad qui en découlerait. Nous allons nous concerter pour nous mettre d'accord sur les suites à donner à sa parution ».

A l'heure où nous rédigeons cette information la nouvelle version modifiée par décret n'a pas été intégrée dans le CASF et reste celle de 2019.