Dans le n° 107-juillet 2019  -  Grand débat national  10533

La voix singulière des seniors âgés, un pouvoir d'intérêt général

A l'occasion du Grand débat initié par le Président de la République, le Cercle Vulnérabilité & Société a souhaité solliciter la parole des personnes les plus fragiles, notamment celle des plus âgées, en leur permettant de s'exprimer pour une fois sur des thèmes dépassant le cadre de leur situation particulière.

Nous voulions ainsi recueillir leur avis de citoyens sur les sujets engageant notre avenir collectif, tels que l'écologie, la démocratie et la citoyenneté... Les envisager comme les parties prenantes pleines et entières du monde contemporain.

Une dizaine de rencontres, menées principalement au sein de structures d'accueil pour personnes âgées (EHPAD) et d'amicales de retraités, ont permis la formalisation de propositions dont la qualité illustre le formidable pouvoir de la parole des plus vulnérables.

Redonner la parole aux aînés est un formidable levier pour changer la donne

Lorsqu'elle est proprement donnée, la parole autorise ces personnes qui se sentent souvent « assignées à isolement », à retrouver un sentiment de pleine appartenance à leur pays. Pouvoir donner leur avis, valoriser leur expérience unique au bénéfice de tous, leur aura permis d'affirmer avec force leur identité propre, en s'extrayant de l'enfermante logique du statut de « dépendant », au profit d'une dynamique de citoyenneté.

Pleinement accueillie, cette parole rappelle à tous ceux qui les accompagnent, soignants, bénévoles associatifs, intervenant socio-sanitaires, que derrière le résident, il y a une toute l'épaisseur d'une expérience de vie, une pensée, des opinions, une richesse intérieure qui dépassent la seule fragilité du corps. Nombreux sont ceux qui, ayant assisté aux débats, sont repartis avec une perception considérablement enrichie des personnes qu'elles côtoient ou accompagnent pourtant depuis des mois ou des années.

Quand elle est partagée, la parole conduit à de nouvelles formes d'innovation sociale.

Les échanges, et plus encore les frictions inhérentes à la passion que cet exercice a suscitée, ont permis de croiser des idées, d'enrichir les opinions et de dépasser avec hauteur le simple « cahier des doléances », pour permettre aux plus âgées d'apporter au débat une contribution active et souvent mue par le souci de l'intérêt général. La situation et le vécu de ces personnes, littéralement « hors norme », semblent amener un regard plus affûté sur la situation de notre pays. Loin de se focaliser sur elles-mêmes, leurs analyses et propositions se sont révélées majoritairement guidées par une formidable attention à la jeunesse et un désir vif de transmettre leur expérience pour favoriser la solidarité au sein de toute la communauté.

Ces enseignements invitent à la poursuite de ce type de dialogue, vécu comme une nouvelle forme d'exercice démocratique, plus proche mais aussi beaucoup plus inclusif.

50 propositions

Au terme des rencontres, 50 propositions ont émergé, visant à passer d'une logique centralisée à une logique d'accompagnement au plus près du terrain et à assurer la transition d'une société de défiance vers une société de confiance.

Ces propositions portent principalement sur :

- La relocalisation démocratique et co-production des décisions, y compris législatives

- Le renforcement de l'accès aux dispositifs de connaissance et d'exercice démocratique

- L'évolution des modes d'exercice du vote

- La meilleure utilisation des ressources et de l'expérience des personnes âgées ou handicapée.

Pour aller plus loin : www.vulnerabilites-societe.fr

Thierry Calvat

Co-fondateur du Cercle Vulnérabilités & Société