Dans le n° 37-octobre 2013  -  Hygiène  1617

"De Sedibus"

S'il vous arrive de passer par Forli, jolie cité Italienne de la province d'Emilie-Romagne, allez flâner du côté de la Piazza Morgagni. Sur un piédestal imposant un homme élégant à la longue chevelure bouclée tend sa main droite vers vous tout en vous toisant d'un regard profond.

Dans sa main gauche il tient un crâne humain mais il n'a rien d'un personnage Shakespearien. Cet homme est en fait Giovanni Battista Morgagni né le 25 février 1682. A ceux qui penseraient que seule la jeunesse est porteuse de lumière il offre un cinglant démenti puisque c'est à l'âge de 79 ans qu'il a publié l'oeuvre colossale qui lui permis de traverser les âges. Compilation organisée en 5 volumes de 3 000 observations faites au cours de sa carrière, son "De Sedibus et Causis Morborum per Anatomen Indagatis" est un apport scientifique majeur dans l'histoire de la médecine. Si aucun de ses sujets d'observation ne lui voua une franche reconnaissance, puisque son art s'exerçait au cours des dissections post mortem, la connaissance de l'anatomie pathologique évolua beaucoup sous son scalpel agile. Parmi ses multiples qualités, l'histoire a retenu un sens de l'humour marqué, avec nombres de remarques ironiques comme "Le malade avait à l'évidence beaucoup souffert de nombreux médecins".

Il serait fastidieux de lister toutes les pathologies dont les lésions furent décrites pour la première fois par ce professeur d'anatomie de l'Université de Padoue. Adepte du mode de pensée d'Hippocrate, il expliqua par exemple que dans l'angine de poitrine, l'asthme et la dyspnée étaient liés à l'atteinte cardiaque. Pour la seule cardiologie, il décrivit l'effusion péricardique, les lésions des valves aortiques et mitrales ou encore les végétations de la péricardite. Si aujourd'hui les échocardiographies transoesphagienne et transthoracique nous permettent d'aborder le diagnostic d'endocardite chez le sujet de son vivant la prévention de cette pathologie reste une préoccupation.

C'est une pathologie que l'on doit suspecter devant une embolie d'origine inconnue ou encore chez un sujet fébrile avec des antécédents de valvulopathie ou présentant des signes neurologiques focaux. Les recommandations européennes de 2009 ont bien reposé les indications d'une antibioprophylaxie limitée aux soins dentaires invasifs chez les sujets à risque à savoir principalement les porteurs d'une valve cardiaque prothétique. Une dose unique d'amoxicilline ou d'ampicilline doit être prise 30 à 60 minutes avant les soins. Depuis 2002 on a limité avec raison en France de le champ de l'antibioprophylaxie. Evidemment la médecine est faite de situations d'exception et des auteurs turcs ont rapporté récemment le cas d'un patient porteur d'une valve cardiaque chez lequel une endocardite et un spondylodiscite à Streptococcus viridans ont été diagnostiqués. La porte d'entrée retenue est la pratique 4 mois auparavant de deux tamponnements nasaux postérieurs pour épistaxis.

Et vous avez-vous en tête le risque d'endocardite ?

En savoir plus:

http://eurheartj.oxfordjournals.org/content/30/19/2369.full.pdf