Dans le n° 120-septembre 2020  -  Conférence Géroscopie - 7 octobre 2020 de 11h15 à 12h  11241

Accompagner la mort en Ehpad : la fin du tabou

Soulager les soignants, accompagner les aidants, échanger avec les résidents. Et si la mort se parlait enfin en EHPAD. Quels rituels mettre en place avant, pendant, après le décès ? Comment échanger en équipe ? Quels rites pour les laïcs ?

Comment accompagner la fin de vie au sein de l'établissement dans lequel ils vivent et travaillent ? C'est la réflexion proposée par Marie-Odile Vincent aux résidents et aux salariés de l'établissement Partage & Vie - Jacques Bonvoisin qu'elle dirige à Dieppe. Pour elle, il s'agit « d'assurer un accompa­gnement de qualité aux résidents en fin de vie et d'al­léger les équipes confrontées à la mort de manière récurrente. Il est lourd psychiquement, pour un salarié, de rentrer chez lui avec le sentiment de n'avoir pas su accompagner une fin de vie. À l'inverse, un accompagnement réussi, c'est-à-dire personnalisé, répondant aux besoins du résident, ap­porte un grand réconfort aux professionnels comme aux familles. »

Lancée en avril 2019, la démarche s'est déroulée en 4 étapes :

- des groupes de parole, sur le thème « Et si ensemble on parlait de la mort ? », animés par un anthropologue et une psychologue, ont réuni salariés et résidents volontaires, et permis d'échanger librement sur un sujet à forte teneur émotionnelle.

- des groupes de travail ont été organisés sur les thèmes ayant émergé durant les groupes de parole. Les salariés en inter pluridisciplinarité et les résidents ont émis des propositions concrètes répondant aux besoins de chacun pour améliorer les pratiques

- Deux sessions de formation ont permis d'acquérir des repères législatifs et d'apprendre à se positionner pour répondre aux besoins des résidents. Et parce que l'accompagnement de la fin de vie ne concerne pas seulement les soignants, tous les professionnels ont été invités à participer :  infirmières, aides-soignantes, agents des services logistiques, animatrice, psychologue, agent de maintenance, personnels administratifs... Dans ces formations, des jeux de rôle ont été organisés grâce à Gaston une marionnette grandeur nature.

- « Gaston la banane », une représentation théâtrale par la compagnie La Magouille. En février 2020, soit un an après le démarrage du projet, les salariés, familles, résidents, mais aussi les partenaires de l'établissement, financeurs du projet, acteurs de santé du territoire ont été conviés à une représentation de marionnettes, support d'échanges aux débats qui ont suivi.

Une évolution tangible

La démarche a permis des réalisations concrètes, précise Marie-Odile Vincent. « Un protocole « fin de vie », co-écrit par les équipes, s'impose désormais dans l'établissement. 20 salariés ont été formés en 2019 et d'autres devraient l'être en 2020. Des rituels ont été choisis pour informer des décès et saluer la mémoire des disparus. Enfin, un droit à l'émotion a été reconnu. Ressentir et partager une émotion à l'annonce d'un décès, ne doit plus être considéré comme un manque de professionnalisme. »

Au-delà de ces réalisations, l'attentive directrice souligne le plaisir des équipes à travailler ensemble et la solidarité induite par le partage et la mise en commun. « Les lignes ont bougé même s'il est difficile de l'objectiver. Les tâches du quotidien ont tendance à séparer les équipes de soins des équipes assurant la logistique. Mais la démarche a prouvé que nous participons tous à la même mission : prendre soin des résidents. Des résidents qui ont des choses à dire sur l'accompagnement souhaité. »

Conférence Géroscopie - 7 octobre 2020 de 11h15 à 12h

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