Dans le n° 98-novembre 2018  -  Se diriger dans l'espace  10115

La signalétique, un critère essentiel de la démarche qualité

La démarche qualité est exigeante. Elle intègre nombre d'items (continuité des soins, personnalisation des accompagnements, montée en compétences des personnels, traçabilité des tâches préventives, curatives ou palliatives, optimisation des organisations, suivi du carnet sanitaire...) mais elle participe aussi d'une démarche d'amélioration de l'architecture, de l'organisation des espaces, de leur aménagement, du mobilier et de la décoration.

Lors de construction ou de la réhabilitation d'un établissement, la Direction décide des travaux et des achats en s'appuyant sur un cahier des charges répondant aux besoins et à la sécurité des résidents et des familles, à la politique de soins et d'hébergement décrite dans le Projet d'établissement et, autant que possible, à l'organisation du travail.

La signalétique, un item à introduire dans les cahiers des charges

La signalétique est parfois budgétisée lors de ces travaux mais elle reste trop souvent validée en seconde intention. Ces dépenses sont jugées non prioritaires et ne sont pas toujours pensées dans le détail. Le cahier des charge répond très souvent davantage à un aspect esthétique qu'aux besoins réels des « utilisateurs » .

De la même manière, la signalétique dans les établissements ouverts n'est pas réactualisée ou adaptée aux nouveaux besoins des résidents ou aux changements de désignation des lieux.

La signalétique : entre signalement et signalisation

Mais qu'est-ce que la signalétique ? Apparu en 1835, ce terme signifie à la fois le signalement et la signalisation. Ainsi en EHPAD, la signalétique décrit, précise, apporte des repères, facilite les voies de communication. Elle envoie des signaux, alerte, renseigne et indique le sens et la direction.

En EHPAD, la signalétique commence par désigner la chambre du résident, les pièces de vie telles que les salles de restauration et d'animation, les salons, espaces bibliothèque, la balnéothérapie etc. Elle permet aussi de reconnaître les pièces dédiées aux professionnels, de distinguer les différentes unités ou services, qu'ils soient administratifs, de maintenance ou la lingerie. Elle est présente partout dans l'établissement, dans les sous-sols, à l'entrée de la résidence, sur les murs extérieurs, pour des utilisateurs nombreux et divers.

Une signalétique aux contrastes forts, et une police « bâton » de préférence

Le premier utilisateur est bien sûr le résident, avec ses problématiques physiques et/ou cognitives. Sa vue d'abord qui peut entraîner quelques difficultés (sans parler de cécité) : vision trouble, presbytie, vision en tunnel... Il est important de savoir que de par la sénescence, la personne âgée est plus sensible aux contrastes. Le noir et le blanc, les contrastes forts apportent un confort certain de visibilité et de lecture. La police d'écriture améliore également la lisibilité. Des polices avec ou sans empattement (« serif » en anglais) tel Garamond, Book antiqua, Perpétua, Goudy Old style, Georgia Baskerville ou Palatino par exemple ont des courbes douces. Elles sont élégantes et lisibles. Mais à l'usage, sur le terrain, nous constatons que les polices sans empattement dites « bâton », facilitent la lecture. Ressenties comme plus raides voire plus froides, les polices Helvetica, Verdana, Tahoma et Arial par exemple semblent plaire et être plus rapidement reconnues.

Pas de police cursive, pas de filigrane non plus...

Les polices cursives qui imitent l'écriture manuscrite ne sont pas recommandées. Contrairement aux idées reçues, les personnes âgées ne reconnaissent pas toujours ces lettres, même si elles les ont utilisées depuis leur enfance. D'autre part, les dessins ou photos imprimés en filigrane, en arrière plan d'un texte rendent la lecture difficile. Ils amoindrissent les contrastes, apparaissent pour certains résidents comme des écritures sous-sous-jacentes qui brouillent l'image.

Choisir la bonne taille et le bon emplacement

La vue des résidents tendant à « baisser », il est important de penser la taille de la signalétique et de la police qui la compose. Les mots sont souvent écrits trop petits et l'image d'illustration trop importante. Sans écrire trop grand non plus (la démesure et les espaces entre les lettres nuisent à la lisibilité et à la lecture globale), il convient de choisir une hauteur de lettre raisonnablement agrandie mais également des emplacements adaptés pour que le message puisse être lu par les résidents autonomes comme en fauteuil roulant, soit une hauteur allant de 1,25 m à 1,50 m.

Des repères rassurants pour tous

La signalétique apporte des repères pour tous : résidents, famille, visiteurs, personnels, et tous intervenants extérieurs. Repère de l'espace lui-même et direction. Les zones de circulation, les nombreuses pièces de vie, les chambres devenues individuelles, les unités spécifiques etc ont participé à l'agrandissement des espaces et à la complexité des bâtiments.

Ces repères permettent de réorienter parfois des personnes aux troubles temporo-spatiaux et guident chacun dans les situations d'urgence, vers les issues de secours.

Une communication améliorée et une dimension humaine supplémentaire

La signalétique rassure et oriente dans ces espaces toujours plus grands ou ressentis comme tels. Elle permet aux usagers de partager le même vocabulaire sans risque d'erreur. Elle décomplexifie, informe et s'oppose au « global », au « labyrinthique » et à l'anonymat. Elle personnalise et donne du sens. C'est pourquoi il est encore mieux de nommer les lieux pour une reconnaissance de ceux-ci rapides sans ambiguïté (salon rouge, restaurant gourmet, espace lavande ou unité des champs fleuris...). Les mots portent une symbolique et une force d'évocation non négligeables : ils apportent une convivialité et une dimension humaine voire une poésie supplémentaire à l'établissement .

Dans les ascenseurs aussi

Rares sont les signalétiques dans les ascenseurs. Nous y trouvons plus volontiers le programme des animations et la fiche d'alerte canicule ou grippe que les photos et la signalétique par étage. Des photos des lieux peuvent être ajoutées. Certains résidents ou familles ne parvenant plus à lire. Le duo photo/mot est alors intéressant.

Pour les personnes souffrant de handicaps visuels aussi !

Selon la loi du 11 février 2005, tous les Établissements Recevant du Public (ERP) doivent pouvoir accueillir tous les publics et permettre aux malvoyants comme aux non-voyants de se repérer dans un bâtiment. La signalétique en EHPAD doit s'adapter à ce public spécifique. Elle doit être en braille et peut idéalement comporter en sus, des pictogrammes photo luminescents facilement reconnaissables. Ces panneaux de signalisation servent à indiquer les lieux clés d'un bâtiment tels que les issues de secours, les toilettes ou l'accueil. Il peut également s'agir de plaques en braille sur les mains courantes, de plans sensoriels ou de de vitrophanie.

La signalétique joue un rôle essentiel dans la démarche qualité et le projet d'établissement au même titre que l'aménagement des espaces de vie, d'une unité protégée ou la construction d'un PASA. Elle améliore la qualité de vie. Qu'on se le dise !

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